Qu'est-ce qui fait courir Chloé, qui a quitté son appartement montréalais dans l'urgence pour se rendre en autostop jusqu'à Tadoussac? Elle cherche, comme bien des gens, à comprendre d'où elle vient. C'est cette quête viscérale de ses origines qu'on suit à la trace dans Tadoussac, deuxième long métrage de Martin Laroche.

Quatre ans après Les manèges humains, dur premier film qui traitait de l'excision, le réalisateur met encore une fois en scène une jeune héroïne. Et il traite également de sujets très féminins: le désir (ou non) d'avoir des enfants et l'instinct maternel sont en effet des thèmes au coeur de ce film réalisé avec sensibilité et beaucoup de doigté.

Tourné avec peu de moyens, Tadoussac est un film au parti pris naturaliste. Sans musique - même dans le générique! - et avec très peu d'éclairage artificiel, il suit de très près la jeune femme, ses silences, ses sourires et ses hésitations. Sa douleur physique aussi, puisqu'elle couve un mal qui, à certains moments, la fait se tordre de douleur. Dans ce contexte de caméra-vérité, ces images sont parfois même difficiles à supporter.

Tadoussac se déroule en plein hiver, mais il n'était pas question d'exploiter les paysages grandioses qu'offre la ville située au confluent du Saguenay et du fleuve Saint-Laurent. Dans ce film en blanc et gris, ce qui compte, ce sont les visages des protagonistes et leurs interactions. La nature autour exacerbe peut-être les sentiments, mais elle ne leur vole pas la vedette.

Il y a donc Chloé (excellente Camille Mongeau, prix de la meilleure actrice lors du Festival international du film francophone de Namur), fragile et déterminée. Et il y a Myriam (Isabelle Blais, solide), guide de kayak à Tadoussac, femme libre et portée sur la bière qui cache un grand secret, et que la présence de Chloé viendra ébranler jusque dans ses fondations.

Chaque comédienne joue sa partition d'une manière délicate et nuancée, sans esbroufe, à l'image de ce film qui réussit à aller très loin dans l'émotion sans jamais tomber dans le pathos.

Tadoussac est plutôt sur le fil du rasoir de la vérité, ne donnant pas toutes les réponses d'un coup et gardant de ce fait même un certain suspense.

Le film se déroule ainsi lentement, par petites touches, jusqu'à une très longue scène finale où les deux femmes se «rencontrent» enfin au téléphone. Une scène parfaitement construite, écrite et jouée, un morceau d'anthologie qui démontre que l'absence de moyens et la rigueur n'empêchent jamais les émotions vraies de se faufiler.

Ce moment fort vient racheter le côté aride et la langueur d'un film sans compromis, dont la fin ouverte laisse heureusement voir une certaine lumière.

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Tadoussac. Drame de Martin Laroche. Avec Isabelle Blais, Camille Mongeau et Juliette Gosselin. 1 h 30.

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image fournie par K-Films Amérique