Avec Marguerite, qu'il a écrit et réalisé, Xavier Giannoli (À l'origineQuand j'étais chanteur) offre à Catherine Frot, dont la carrière est déjà riche en prestations admirables, l'un de ses plus beaux rôles.

Inspiré de la vie de Florence Foster Jenkins (que Meryl Streep a récemment incarnée avec superbe, mais dans le film plus convenu de Stephen Frears), Marguerite transpose la pseudo-soprano dans le Paris des années folles.

Elle s'appelle Marguerite Dumont, elle possède une fortune. C'est d'ailleurs elle, la fortune plus que la femme, qu'a épousée Georges Dumont (André Marcon), qui a un titre (il est baron), mais est totalement désargenté.

Outre ses sous, Marguerite possède une... voix. Fausse. Terriblement fausse. Qu'elle met au service (!) de ces airs d'opéra qu'elle chérit. Depuis des années, elle chante devant des spectateurs... disons, conquis d'avance, parce que là pour apprécier.

Personne ne lui a jamais dit combien, en réalité, son ramage rivalise avec celui des paons qui paradent dans les jardins. Évoquer la crécelle est ici un euphémisme. Dire seulement «elle fausse», un compliment.

C'est donc avec une belle innocence qu'un jour, elle décide de présenter un concert devant un véritable public, dans une véritable salle de spectacle.

Marguerite pourrait être drôle. Et ça l'est. Jusqu'à ce que ce ne le soit plus.

Formidable Frot

Ce ne l'est plus grâce à Xavier Giannoli, impeccable dans un scénario profond et sans cynisme, dans sa réalisation sans fautes (on lui pardonne ainsi ce faux pas qu'a été Superstar) et dans le choix de ses acteurs, Catherine Frot en tête.

Elle aussi, probablement même surtout, fait de cette Marguerite un être attachant dans son ridicule, irrésistible dans sa candeur, émouvant dans sa passion pour la musique. Déchirante et déchirée. Tragique pour toutes ces raisons.

Le personnage aurait pu être l'ersatz d'une Castafiore. Il ne l'est pas. Car la caricature n'est pas de cet air-là.

Gravite autour d'elle, dans une reconstitution d'époque impeccable et des images magnifiques (certaines formant une ronde tragicomique), une galerie de personnages formidablement ambigus. Madelbos, le chauffeur-photographe (Denis Mpunga), Lucien Beaumont, le journaliste-écrivain (Sylvain Dieuaide), Atos Pezzini, la star en route pour l'oubli (Michel Fau), Félicité, la femme à barbe-tireuse de cartes (Sophia Leboutte), etc. Complices ou profiteurs? Amis ou ennemis? On sait. On croit savoir. On ne sait plus. Et lorsque tombent les dernières images, le sentiment demeure.

Rire ou pleurer devant Marguerite? Rire. Et pleurer.

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Marguerite. Drame de Xavier Giannoli. Avec Catherine Frot, André Marcon, Michel Fau. 2h09.

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Image fournie par Les Films Séville

Marguerite