Au moment où le drame de la communauté d'Attawapiskat fait les manchettes, et à l'heure où les tragédies vécues par les Premières Nations sont enfin abordées de plein front, un film comme Avant les rues tombe bien sûr à point nommé.

Cela dit, il convient de préciser d'entrée de jeu que la réalisatrice Chloé Leriche propose ici une oeuvre de fiction dont l'approche est plus évocatrice que didactique. C'est qu'il y a aussi du cinéma dans Avant les rues. Du beau. Du vrai.

La dure réalité dans laquelle vivent les autochtones est ainsi transcendée par une histoire à travers laquelle est célébrée leur culture traditionnelle. Le film - le tout premier tourné en langue atikamekw - commence d'ailleurs au son d'un chant qu'exécutent un jeune homme et sa soeur. C'est un peu comme si, à travers ces envolées vocales déchirantes qu'on dirait mues par des forces d'origines ancestrales, toute l'histoire du peuple était évoquée.

La cinéaste pose ainsi les jalons d'un récit placé sous le signe de la réconciliation. Et de la guérison.

Shawnouk (Rykko Bellemare) s'est trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. Un peu désoeuvré, coincé dans une réserve où les possibilités d'épanouissement professionnel sont plutôt limitées, le jeune homme est entraîné dans l'histoire d'un vol, orchestré dans un chalet en plein bois. Impliqué alors dans un meurtre accidentel, il se réfugie en forêt, mais son isolement sera de courte durée. En retournant dans sa communauté, Shawnouk tentera de se libérer du poids de la culpabilité en renouant avec les pratiques traditionnelles de son peuple. Cette démarche donne d'ailleurs lieu à de très belles scènes, subtilement empreintes de poésie.

Bâtir des ponts

Réalisé en collaboration avec les trois communautés atikamekw du Québec, Avant les rues met de l'avant une culture qui reste méconnue aux yeux de la majorité des Québécois. À cet égard, l'expérience de la réalisatrice dans le cinéma de nature sociale, notamment dans le cadre du Wapikoni mobile, sert ici à bâtir des ponts, à établir un dialogue.

Les acteurs étant pratiquement tous des non-professionnels, le jeu d'ensemble se révèle forcément inégal. Le récit aurait également gagné à être resserré sur le plan dramatique. Cela dit, le jeune Rykko Bellemare possède une vraie belle présence à l'écran.

La richesse de ce film, tourné dans des conditions modestes, réside aussi dans cette faculté qu'a la réalisatrice d'évoquer la beauté des choses - la nature notamment - tout en abordant aussi les conditions très dures dans lesquelles les communautés autochtones doivent vivre dans les réserves. Les images, signées Glauco Bermudez, font d'ailleurs souvent écho à ce contraste.

On pourra dire qu'en plus de nous offrir un beau film, Chloé Leriche aura assurément fait oeuvre utile.

* * * 1/2

Drame. Avant les rues. De Chloé Leriche. Avec Rykko Bellemare, Kwena Bellemare-Boivin, Jacques Newashish, Martin Dubreuil. 1h37.

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