Fidèle à son habitude, Denis Côté met de l'avant une proposition cinématographique originale, cette fois en suivant le questionnement existentiel d'un riche industriel. Sur le plan formel, Boris sans Béatrice impressionne. Les images (signées Jessica Lee Gagné) sont magnifiquement composées, le style est impeccable et les cadrages sont méticuleusement soignés. Au chapitre du récit, le nouveau long métrage de l'estimé cinéaste, neuvième au compteur, se révèle cependant un peu moins engageant.

L'entrée en matière laisse entrevoir une vision très satirique, mais Denis Côté préfère ensuite emprunter une autre voie, plus clinique qu'empathique.

Il installe le statut social de son protagoniste dès le départ en montrant ce dernier au milieu d'un champ au moment de l'arrivée de son hélicoptère privé. On voit ensuite ce digne représentant de la haute société réprimander du haut de sa superbe la vendeuse de la boutique où il achète ses chemises griffées. La pauvre jeune fille a eu le malheur de tenter de lui soutirer des renseignements personnels aux fins de statistique et de stratégie de marketing.

Il se trouve pourtant que ce Boris Malinovsky (excellent James Hyndman) est aussi l'époux d'une ministre du gouvernement fédéral. Ayant sombré dans une profonde dépression, qui l'a plongée dans un profond mutisme, Béatrice (Simone-Élise Girard) a dû prendre congé pour une durée indéterminée, ce qui, évidemment, soulève l'inquiétude du premier ministre (en passant, applaudissons l'idée - formidable - d'avoir confié ce rôle au cinéaste Bruce LaBruce!).

Aussi Boris fait-il de même. L'homme d'affaires décide de quitter son poste pour une durée indéterminée, histoire de prendre soin de son épouse. 

Cette rencontre avec lui-même donnera aussi lieu à une grande introspection personnelle, à travers laquelle il remettra tout en question.

S'il tente de trouver des réponses concrètes auprès de sa propre fille (Laetitia Isambert-Denis) et de sa mère (Louise Laprade), Boris trouve aussi conseil auprès d'un être étrange (Denis Lavant), le seul qui, dans cette galerie, semble être en phase avec sa propre nature. De surcroît, Boris doit démêler les liens sentimentaux entretenus avec deux autres femmes. Helga (Dounia Sichov) est l'une de ses employées; Klara (Isolda Dychauk) est celle qui prend soin de Béatrice à la maison.

Un conte moral

À la charge anti-bourgeoise attendue, Denis Côté oppose plutôt, à sa façon bien sûr, une réflexion plus nuancée. De son propre aveu, Boris sans Béatrice relève davantage d'un conte moral faisant écho à un questionnement intime, commun à tous les mortels.

On saluera par ailleurs cette volonté du cinéaste de faire appel aussi à des acteurs moins connus des spectateurs. Et d'évoquer dans son cinéma la réalité plurielle dans laquelle nous vivons.

Force est de reconnaître toutefois que le récit, dans lequel s'entremêlent aussi des références à la mythologie grecque, laisse parfois le spectateur sur la touche. Boris sans Béatrice se révélera néanmoins incontournable pour les cinéphiles avides d'oeuvres plus singulières.

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DRAME. Boris sans Béatrice. De Denis Côté. Avec James Hyndman, Simone-Élise Girard, Denis Lavant. 1h33.

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PHOTO FOURNIE PAR K FILMS AMÉRIQUE