Christophe Honoré aime visiblement le cinéma d'une autre époque. Il le prouve avec Les chansons d'amour, son hommage au cinéma de Jacques Demy que nous verrons ici l'hiver prochain, et aussi avec Dans Paris, son précédent film qui, enfin, arrive sur nos écrans.

On y trouve en effet cette nette volonté de faire écho à la Nouvelle vague en orchestrant un récit libre d'esprit, dont la mise en images réclame impérativement des fulgurances comme autant d'états de grâce. Le résultat est forcément inégal, mais il subjugue parfois au détour d'un geste, d'une esquisse, d'un sentiment ou d'un éclat de rire. Une histoire sombre, sertie pourtant de légèreté et d'insouciance. Comme une radiographie en prise directe sur la vie.

Pour Paul (Romain Duris), cette vie n'est pas toujours drôle. En tout cas pas en ce moment. Vivant mal une rupture sentimentale, le jeune homme est venu se réfugier dans le minuscule appartement qu'occupent son père (Guy Marchand) et son frère cadet Jonathan (Louis Garrel). Dépressif, Paul passe pratiquement toutes ses journées au lit en tentant d'évacuer sa peine, lorgnant parfois même du côté du balcon de façon un peu inquiétante.

De prime abord, Jonathan semble être le parfait contraire de son frère. Comme quelqu'un qui cacherait sa douleur sous une apparente frivolité. Il a du charme et il en profite. Il a même parfois le culot de s'adresser directement au spectateur.

Honoré explorera ainsi la dynamique qui se crée entre les deux frangins dans ce contexte particulier, sans oublier leur rapport avec leur père. Ce dernier semble d'ailleurs être complètement dépassé par les événements.

Bien qu'en retrait, les femmes n'en constituent pas moins le coeur du récit. Il y a celle que pleure Paul; il y a celles, nombreuses, que courtisent Jonathan; il y a la mère (Marie-France Pisier), celle qui, un jour, s'est tirée avec «un bûcheron canadien»... Il y a aussi une soeur dont la présence pèse lourd dans l'inconscient familial.

Le cinéaste aura ainsi su concocter un film sous influences tout en gardant sa personnalité propre. De même, il aura su tirer le meilleur de ses acteurs. Duris module magnifiquement le désespoir de Paul, et Garrel est, une fois de plus, impeccable. Guy Marchand propose également une remarquable composition.

Si le film est parsemé de flottements, on notera toutefois quelques moments réellement bien inspirés, notamment cette scène fort émouvante au cours de laquelle Paul et Anna, la femme qui l'a quitté, se chantent leur amour au téléphone sur un air d'Alex Beaupain, celui-là même dont les chansons serviront à construire Les chansons d'amour, le prochain film. La démarche de Christophe Honoré ne pourrait être plus cohérente.

Dans Paris

Comédie dramatique réalisée par Christophe Honoré. Avec Romain Duris, Louis Garrel, Guy Marchand.

Les aventures sentimentales de deux frères, dont l'un est dépressif à la suite d'une séparation.

Un film inégal, parsemé de fulgurances.

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