Dans ce grand Canada vertueux et propret (Québec inclus), vaste pays des bonnes manières et du civisme élémentaire où il est désormais interdit de fumer même dans les bars, griller cigarette après cigarette et vider bière après bière deviennent des gestes d'insurrection.

À l'instar des Bougons, les Trailer Park Boys font exactement tout ce qu'il est officiellement déconseillé de faire: ils fument (et pas que du tabac), ils trinquent, ils «malbouffent». Pire encore, et toujours comme nos Bougon, ils volent. Petits malfaiteurs sans envergure et sans malice, les Trailer Park Boys sont de pauvres diables qui essaient de s'en sortir avec les moyens du bord, risquant toujours la prison mais évitant toujours les excès de violence qui en feraient de véritables criminels.

Malgré tous leurs travers, ils inspirent la sympathie. Trailer Park Boys : The Big Dirty est la version cinéma d'une série de télévision canadienne apparemment très populaire puisqu'elle en sera bientôt à sa septième saison mais que nous avouons ne pas bien connaître. Ce film de Mike Clattenburg, créateur de la série, veut à la fois combler les fans, sans doute conquis d'avance, et trouver du même coup un nouveau public. Nos trois héros, enfin nos trois zéros, habitent Sunnyvale, une sorte de bidonville minable fait de maisons-remorques et peuplé de parias et de laissés-pour-compte. À peine sortis de prison pour vol de cigarettes, ils sont déjà sur un autre gros coup : voler la monnaie d'une machine à jouer dans un cinéma. Avant de faire, ils s'exerceront en pillant le contenu des parcmètres : ces boys maladroits ne piquent apparemment que du petit change. Le «maire» de Sunnyvale, un ancien gendarme alcoolo, voudrait bien expulser nos larrons de son îlot tranquille, mais les gars, habitués, trouvent toujours mille moyens de se sortir du pétrin.

Par ses allures de faux documentaire, Trailer Park Boys : The Big Dirty rappelle l'excellent Fubar de Michael Dowse, autre comédie canadienne qui porte sur les aléas de la vie des pauvres gens, la vie des gentils vauriens mal élevés et sans éducation. Mais Fubar, contre toute attente, possédait une mystérieuse charge émotive; ses protagonistes, au bout du compte, inspiraient l'empathie. Le film de Mike Clattenburg n'est qu'une épaisse comédie et pas des plus drôles.

Dans le même registre, c'est-à-dire dans le sous-genre des «comédies avec des bandits losers», on trouvera mieux : La vérité si je mens, ou encore le classique de Lelouch L'aventure c'est l'aventure. Évidemment, seuls les initiés sauraient dire si Trailer Park Boys : The Big Dirty est fidèle à l'esprit de la série télé. Pour le néophyte, qui ne s'est pas attaché aux personnages et qui ne connaît rien de leur univers, ce film passera, au mieux, pour un petit spectacle divertissant mais sans grand intérêt.

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Trailer Park Boys : The Big Dirty, comédie de Mike Clattenburg. Avec Rob Wells, John Paul Tremblay, Mike Smith.

Une bande de petits bandits malhabiles organise le «coup du siècle» : voler le contenu d'une machine à jouer dans un cinéma.

Petit divertissement sans conséquence, sans grand intérêt.