Le cinéma de Christopher Nolan est épatant. On ne dira pas génial ou transcendant mais proprement épatant. Memento proposait un thriller à l'envers, c'est-à-dire en commençant par la fin pour nous ramener lentement au début, forçant le spectateur à se prendre la tête pour reconstituer lui-même une sorte de double puzzle.

Nolan a aussi sauvé la franchise Batman de la médiocrité en lui donnant un second souffle grâce à son Batman Returns, un film de genre pertinent, un blockbuster exceptionnellement intelligent. Enfin Nolan s'amuse à brouiller les pistes et à mêler les cartes, et sa courte filmographie en témoigne. Ce nouveau The Prestige s'ajoute comme une étoile à son petit carnet qui ne compte même pas cinq longs métrages.

Avec cette histoire d'illusionnistes, Nolan se trouve, comme on dit, dans son élément, lui qui semble concevoir ses films comme autant de trucs de magie. On est en Angleterre à l'aube du siècle dernier, deux prestidigitateurs de renoms, Angier (Hugh Hackman) et Borden (Christian Bale) sont rivaux. Borden conçoit un sketch extraordinaire où il peut, sur scène, disparaître d'un côté pour réapparaître de l'autre. Angier voudra faire mieux et aura recours aux services d'un mystérieux industriel versé en sciences (David Bowie) lequel lui ventera les mérites d'une étrange machine, une sorte de téléporteur à la Star Trek ou à la The Fly, faite ici de bois et de filages. Machine dangereuse quand on sait bien s'en servir (c'est une petite usine à clonage, mais n'en disons rien...)

The Prestige flirte avec la science-fiction et la rétro-fiction: jamais on ne saura de quoi est fait cet engin bizarre. Nolan réfère évidemment à cette paralittérature et à tout ce cinéma B qui présentaient, sans devoir nécessairement recourir à l'explication scientifique, des inventions merveilleuses ou des machines infernales. Beaucoup seront évidemment tentés de comparer ce film au récent, et tout aussi excellent, The Illusionist de Neil Burger: les deux films font référence au monde de la bande dessinée «adulte». Mais, malgré ses longueurs et ses vagues promesses érotiques (Scarlett Johansson, dans un rôle vraiment secondaire), The Prestige est sans doute le film fantastique le plus chic, le plus ciré et le plus lustré, de cette année.

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The Prestige (V.F.: LE PRESTIGE)Drame de Christopher Nolan. Avec Hugh Jackman, Christian Bale, Scarlett Johansson.

Duel à finir sans merci entre deux prestidigitateurs, à l'aube du XXe siècle

Christopher Nolan fait de la magie, et ça marche!