On chercherait longtemps, et probablement en vain, un équivalent français juste et efficace à ce que nos voisins du Sud appellent le «buddy movie».

La traduction littérale, «film de copains», ne fait pas nécessairement très viril, alors qu'évidemment le «buddy movie» est un sous-genre cinématographique essentiellement macho : deux héros (deux policiers en général), que tout oppose, doivent faire fi de leurs différences, apprendre à mieux se connaître, à unir leurs forces respectives pour ensemble venir à bout des méchants bandits. C'est 48 Hours, c'est Lethal Weapon, c'est Bad Boys, c'est Bon cop, bad cop et c'est Hot Fuzz

Car il ne faudrait pas s'y méprendre, le Hot Fuzz d'Edgar Wright est un authentique «film de chums» et non une parodie du genre, façon David Zucker et ses comparses (Airplane), tout comme l'excellent Shaun of the Dead, du même Edgar Wright, était un vrai film de zombis.

La différence entre la parodie et l'hommage n'étant pas toujours facilement identifiable au cinéma, il faudra parler de Hot Fuzz comme d'un pastiche respectueux et affectueux : Wright, visiblement, adore les «buddy movies», s'en est gavé toute sa jeunesse, en connaît les codes et le vénère suffisamment pour être autorisé à s'en moquer, toujours avec tendresse.

Ce que Wright avait magistralement réussi avec Shaun of the Dead, à savoir créer un film de genre hors genre, il le réussit avec son second long métrage, une comédie policière complètement délirante, à prendre au deuxième degré, toujours aux limites de la farce, mais aussi un film d'action efficace et tape-à-l'oeil à l'image de ses modèles (Hot Fuzz se réfère notamment à Point Break et Bad Boys II).

Le sergent Angel (Simon Pegg), un agent de la paix fier, loyal, droit et extrêmement efficace, est le super flic de Londres, ses exploits sont rapportés par les médias. Il devrait être considéré comme un héros, mais son zèle gêne les confrères et les supérieurs. En deux mots, Angel est «trop bon», et son ardeur à l'ouvrage est telle que tous les membres du corps policier passent pour de vulgaires gendarmes.

Aussi le super flic est-il envoyé dans la campagne anglaise, où il devra s'occuper de vétilles et de délits très mineurs, en compagnie d'une bande de policiers paresseux et las qui passent leurs journées à bavasser et à manger des pâtisseries.

Mais il se passe des choses étranges dans ce village idéalement paisible, qui rappelle celui de la série Le prisonnier. Des meurtres sordides sont commis et la population, comme les agents, semblent tout à fait indifférents à cette épidémie de violence. Le policier surdoué veille, supporté par son nouvel ami Danny (Nick Frost), un gros fainéant, adepte de films d'action et qui retrouvera un peu de courage et de dignité au contact d'Angel.

La dernière demi-heure, jouissive, est un feu roulant d'action, de cascade, de massacre à la mitraillette, cela servi avec une bonne humeur contagieuse, un humour pince sans rire et un sens parfaitement assumé de l'excès et du mauvais goût. Avec ses potes Simon Pegg et Nick Frost (qui formaient le duo de Shaun of the Dead), Edgar Wright, le «Tarantino british», signe une belle oeuvre de «récupération», , un film de fan, fait par des fans pour les fans, tout à fait de son temps. Les producteurs de chez nous, qui cherchent tant à fabriquer du bon cinéma de genre, intelligent et raffiné, devraient aller voir et prendre des notes, cela ferait de meilleurs Bon cop, bad cop.
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* * * 1/2

Hot Fuzz (V.F.: Super flic), comédie d'Edgar Wright. Avec Simon Pegg, Nick Frost, Timothy Dalton.

Relégué à des tâches futiles et faciles dans un village d'Angleterre, un superflic londonien découvre, aidé par son collègue paresseux, qu'il s'y passe des choses étranges.

Pastiche révérencieux, comédie déjantée, film d'action viril et pétaradant, Hot Fuzz livre toute la marchandise, avec un gros clin d'oeil.