Tony Scott est presque titulaire d'un sous-genre à lui seul : ses films sont gros, chers, tapageurs, rarement subtils. Déjà vu se distingue dans le corpus d'ensemble du réalisateur de Crimson Tide, car ce dernier propose ici un film qui, bien que cohérent dans la manière, se révèle un peu plus classique dans son exécution. Et si, bien entendu, le récit défie toute logique plus souvent qu'à son tour, Déjà vu fait néanmoins partie de ces thrillers efficaces pour lesquels le spectateur cède de bon gré à la manipulation.

Le début du film est d'ailleurs marqué par l'explosion spectaculaire d'un traversier dans le port de La Nouvelle-Orléans. Concluant vite à un attentat, des agents fédéraux sont dépêchés sur les lieux pour mener l'enquête, parmi lesquels Doug Carlin (Denzel Washington). Ce dernier est très vite recruté par une nouvelle cellule du FBI ayant accès à une technologie ultrasecrète, mise au service des autorités gouvernementales. Grâce à ce nouvel appareil, les forces de l'ordre ont désormais la capacité d'ouvrir une fenêtre sur le temps afin de retrouver des preuves permettant de porter des accusations. On peut ainsi observer «en direct» une réalité qui a eu lieu quatre jours, six heures et des poussières auparavant, sans toutefois avoir la possibilité d'avancer, ni de reculer dans le temps pour en isoler un événement très précis.

L'une des victimes de l'attentat étant une jeune femme (Paula Patton) qui aurait peut-être eu un lien avec le présumé responsable (sinistre Jim Caviezel), Carlin s'intéresse particulièrement au parcours de cette dernière. Dans une espèce de concept qui mêlerait à la fois l'astuce de Memento aux abus de pouvoir d'Enemy State (du même Scott), les derniers jours de la vie de la victime se retrouvent ainsi étalés devant les yeux des agents du FBI, provoquant notamment chez l'agent un émoi qui ressemble à un sentiment amoureux.

C'est ainsi qu'on retrouve ce vieux fantasme consistant à pouvoir retourner dans le temps pour changer le cours des choses. Cet aspect est d'ailleurs traité de façon habile dans le scénario (écrit par Bill Marsilii et Terry Rossio), quoique le dénouement de l'histoire alimentera bien des discussions.

On tiquera aussi sur le caractère voyeur d'un récit qui mise sur une technologie qui permet de suivre une personne jusque dans les moindres recoins de son intimité. On remarquera par ailleurs que sur le plan de la réalisation, Scott ne s'est pas appuyé sur les effets de style qui agaçaient tant dans ses deux précédents films, Man on Fire et Domino. Cela dit, Déjà vu reste évidemment un gros film hollywoodien (avec tous les excès que cela implique), ponctué toutefois de solides prestations des vedettes, à commencer par Denzel Washington. Val Kilmer, qui retrouve ici le cinéaste qui l'a révélé il y a 20 ans dans Top Gun, propose de son côté une composition très sobre dans le rôle du chef de service.

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DÉJÀ VU, suspense de science-fiction réalisé par Tony Scott. Avec Denzel Washington, Paula Patton, Val Kilmer, Jim Caviezel.

Appelé à enquêter sur les lieux d'un attentat terroriste, un agent est invité à utiliser une technologie permettant de reculer de quatre jours dans le temps.

Un film tapageur mais efficace.