Ce film a beau avoir été inspiré par la vie d'un individu qui fut un jour sans abri, on éprouvera quand même un certain malaise devant l'histoire qui nous est ici racontée. Pas tant à cause de la manière qu'on veut très touchante que par le message que sous-tend le récit.

On nous reporte ainsi au début des années 80, une période plus difficile sur le plan économique, qui a fait de nombreux laissés-pour-compte. Parmi ceux-là, Chris Gardner (Will Smith), un homme qui essaie désespérément de faire vivre sa famille en tentant de vendre un appareil médical dont la clientèle cible, les médecins en l'occurrence, n'a visiblement que faire. Aussi Chris se retrouve-t-il seul avec son jeune fils âgé de 5 ans (Jaden Smith) quand son épouse (Thandie Newton) décide de foutre le camp pour aller se faire une autre vie ailleurs

Le récit décrit alors la déchéance du protagoniste, qui atteint les bas-fonds en se retrouvant sans abri. Comme la Constitution américaine stipule que tout individu a droit à la vie, à la liberté, et à la «poursuite du bonheur», le film fera bien entendu écho aux efforts que fera Chris pour s'en sortir. Ce faisant, il célébrera aussi la réussite d'un homme qui, à force de s'acharner, finit par décrocher un emploi au sein d'une importante firme de courtage.

Bien sûr, Will Smith offre une prestation solide, parfaitement calibrée pour se faire remarquer des académiciens qui voteront aux Oscars. L'acteur est d'autant plus touchant qu'il donne ici la réplique à son propre fils, un enfant au bagout irrésistible qui, visiblement, possède un sens naturel du jeu.

De même, la réalisation du cinéaste italien Gabriele Muccino, qui signe sa première réalisation américaine, est très honnête. Elle convient en tous points au cahier des charges de la bonne comédie dramatique dont le but avoué est de nous faire imbiber nos mouchoirs.

On ne pourra toutefois s'empêcher de noter l'aspect un peu plus discutable d'un récit qui nous indique que le «bonheur» passe nécessairement par la réussite financière. Et la quête effrénée aux millions de dollars dans le compte de banque.

On insistera ainsi sur le parcours particulier de Gardner quand il doit survivre dans une extrême pauvreté mais le contexte social dans lequel ce dernier évolue n'est pratiquement pas évoqué. On glorifiera ainsi la réussite d'un individu qui a pu réussir à sortir la tête hors de l'eau grâce à un talent exceptionnel, mais jamais le sort de tous les autres exclus du système n'intéresse les artisans. D'où le malaise.

L'histoire de Chris Gardner, qui est aujourd'hui millionnaire, prend plus ici les allures d'une fable plutôt que celles d'une tranche de vie. L'aspect trop sentimental de The Pursuit of Happyness (La poursuite du bonheur en version française) ne fait que renforcer cette impression.

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* * 1/2

The Pursuit of Happyness (La poursuite du bonheur en version française), drame réalisé par Gabriele Muccino. Avec Will Smith, Jaden Christopher Syre Smith, Thandie Newton.

Un homme sans abri ayant la garde de son jeune fils tente sa chance dans une firme de courtage.

Une prestation solide de Will Smith mais le film provoque un malaise.