On ne vous fera pas de cachotterie. Le nouveau film de Pascal Bonitzer correspond en tous points au profil du film français qui, en certains milieux, fait fuir les spectateurs à toutes enjambées. À leurs yeux, ce film paraîtra verbeux, parfois chiant, et terriblement parisien.

Il y a une fille à poil aux prises avec de graves problèmes d'ordre mental (Marina de Van); son ancien amant éditeur (Édouard Baer) qui, à la suite d'un cliché dérobé, doit fournir des explications à son amoureuse actuelle (Géraldine Pailhas); et l'ancien amant de cette dernière, romancier bien connu (Charles Berling), qui lui a vampirisé des chapitres de sa vie privée pour nourrir son nouveau bouquin.

Et on se gifle, et on s'engueule, et on se menace, et on tente de se suicider, et on se re-gifle On refait son parcours sentimental à l'intérieur d'un cercle fermé à double tour dont seuls les détenteurs du code déontologique de Saint-Germain-des-Prés parviendront à saisir toutes les références. Au-delà des clichés, les admirateurs d'un certain cinéma français pourront, eux, prendre un certain plaisir à cet espèce de vaudeville catastrophe qui prendra des allures très sombres (ou loufoques, c'est selon).

Car même si le film Bonitzer n'est pas «aimable», la problématique soulevée est amenée de manière assez habile. L'utilisation d'éléments de la vie privée d'une personne pour en faire une matière à fiction constitue un thème récurrent, que Bonitzer aborde quand même de façon originale. D'autant plus que l'auteur cinéaste utilise parfois ici les codes du film fantastique pour parvenir à ses fins.

Cela dit, il ne faudrait pas voir en Je pense à vous un film de genre pour autant. Il s'agit avant tout d'une chronique extrêmement dialoguée, livrée par des acteurs solides qui, parfois, semblent hésiter par rapport au ton qu'ils doivent emprunter. C'est le cas d'Édouard Baer qui semble par moments avoir du mal à trouver ses repères. Berling est en revanche magnifique dans le rôle de l'écrivain manipulateur et égocentrique dont l'ouvrage provoquera tout ce tumulte.

Certains spectateurs qui prendront cette histoire au douzième degré, savoureront probablement aussi les moments de franche rigolade créés par ce qu'ils croiront être de l'ironie. Il n'est pourtant pas dit que là était l'intention de l'auteur.

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* * 1/2

JE PENSE À VOUS, comédie dramatique réalisée par Pascal Bonitzer. Avec Édouard Baer, Géraldine Pailhas, Charles Berling, Marina De Van.

La vie d'un éditeur est perturbée par la parution prochaine d'un roman dans lequel un auteur a repris des éléments relevant du domaine de sa vie privée.

L'approche française poussée à son maximum. À prendre ou à laisser.