Il y a cinq ans, le cinéaste inuit Zacharias Kunuk avait créé la surprise avec Atanarjuat (The Fast Runner), production lauréate de la Caméra d'or au Festival de Cannes (prix remis au meilleur premier film, toutes sections confondues), et du prix du meilleur film canadien au Festival de Toronto.

Avec son fidèle complice producteur et directeur photo Norman Cohn, qui cosigne cette fois la réalisation, Kunuk revient avec The Journals of Knud Rasmussen, une coproduction canado-danoise dans laquelle il s'attarde à décrire les bouleversements qu'a entraînés chez les peuples inuits leur rencontre avec des Blancs au début des années 20.

L'explorateur danois Rasmussen a beau prêter son nom au titre du film, Kunuk et Cohn privilégient évidemment le point de vue des leurs.

Le récit commence d'ailleurs avec une proposition intrigante en montrant une jeune femme en train de faire l'amour avec l'esprit de son mari mort.

Aussi le spectateur s'attardera-t-il au parcours de cette femme, intimement lié à celui de son père, un shaman qui préférerait de loin que sa fille ait autant de considération pour son nouveau mari.

Le récit, raconté sur un rythme très lent, fera aussi écho à un périple qu'entreprendront les personnages avec deux des membres de l'équipe de l'explorateur Rasmussen. Sur leur chemin, les protagonistes rencontreront en outre une communauté qui s'est convertie au christianisme.

Des images somptueuses

Visuellement, le film est évidemment splendide. L'approche est par moments austère, quasi contemplative, mais les images, signées Cohn, ne sont parfois rien de moins que somptueuses.

Plus académique qu'Atarnajuat, The Journals of Knud Rasmussen n'apparaît pourtant pas aussi maîtrisé que son illustre prédécesseur. Kunuk et Cohn proposent en effet des pistes intéressantes sans ne jamais s'y aventurer vraiment. On aurait ainsi aimé que le récit fasse mieux écho au brassage idéologique qui s'est déroulé à cette époque au sein des communautés inuites.

De même, le lien tangible entre le monde matériel et spirituel aurait pu être exploré de façon plus soutenue sur le plan dramatique. On ne pourra faire autrement non plus que de remarquer l'aspect parfois opaque d'un récit qui ne donne pas toutes ses clés. Il faudra ainsi entrer dans l'univers de Rasmussen en sachant qu'il s'agit d'un monde qui utilise des codes narratifs différents. Il n'est toutefois pas dit que tous auront envie d'être du voyage...

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The Journals of Knud Rasmussen, Drame ethnographique réalisé par Zacharias Kunuk et Norman Cohn. Avec Leah Angutimakik, Pakak Innuksuk, Neeve Uttak. 1h53.

Au début des années 20, des ethnologues danois sont témoins de la transformation que subit le peuple inuit au contact des Blancs.

Un film beau mais austère.