Disons-le d’emblée : filmer l’histoire d’un bourreau, ce n’est pas le sujet le plus charmant en ville. Mais à travers la vie du plus célèbre bourreau britannique, il y a toute une réflexion sur la peine de mort et la relation de la société avec ses criminels. Voilà pour raviver votre intérêt...

Albert Pierrepoint (T. Spall) fut un des derniers bourreaux d’Angleterre et la méthode d’exécution qu’il a peaufinée, ainsi que sa rapidité, lui ont valu d’être appelé par le général Montgomery pour exécuter les criminels condamnés par le tribunal de Nuremberg pendant la Seconde Guerre mondiale.

Son macabre métier, héritage paternel, devait s’exercer dans la stricte confidentialité. Or, son terrible «effort de guerre», rapporté par les médias, a fait de lui une sorte de héros. Et c’est à travers cette consécration que le caractère absurde de son existence a commencé à lui sauter à la face. Celui qui exécutait froidement et prenait soin des morts, «expiés de leurs péchés», a vu grandir en lui une faille qui a miné sa légendaire force de caractère.

Le drame qui se joue dans la tête d’Albert Pierrepoint se dessine lentement, comme une boule qu’on roule dans la neige et qui grossit, grossit. Tout repose sur le non-dit, car un bourreau ne cause pas boulot avec sa femme le soir... Timothy Spall, avec ses airs tranquilles, laisse petit à petit paraître le trouble dans son regard. La gradation de la tension psychologique se révèle très efficace et l’interaction de Pierrepoint avec sa femme, qui le pousse à continuer de manière plutôt égoïste, marquent les temps forts du film.

Ce qui est difficile à encaisser, c’est le défilé macabre des pendaisons. Était-ce nécessaire d’en montrer autant pour sentir l’absurdité du métier de bourreau? La question se pose. Pas que le film soit sensationnaliste. La réalisation est plutôt sobre, mais on a voulu montrer à quoi ressemble le dernier face à face d’un condamné, à quoi ressemble le quotidien d’un tueur «légitime» et quels effets peut avoir l’accumulation de morts sur la conscience.

C’est dérangeant, mais peut-être qu’au bout du compte, c’est un plaidoyer efficace contre la peine de mort. Peut-être aussi qu’il fallait montrer ce que le bourreau a dû taire à sa famille et à son entourage pour comprendre ce qu’il a pu vivre.

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Pierrepoint

Drame d’Adrian Shergold
Avec Thimoty Spall et Juliette Stevenson