Ned, personnage central de la comédie Our Idiot Brother, est le plus gentil antihéros que le cinéma américain ait connu depuis Forrest Gump. Mais contrairement au bonasse personnage qu’a immortalisé Tom Hanks, Ned ne souffre d’aucun handicap intellectuel connu. Il est juste un bon gars porté par sa candeur et ses idéaux. Hélas, les Ned de ce monde ont la vie dure à une époque où le mensonge, la tricherie, le cynisme et l’égoïsme font la loi.

Campé avec un bonheur flagrant par Paul Rudd – qui, pour les besoins de la cause, affiche une pilosité et un look très «grano-poncho» –, ce Ned au destin comico-catastrophique est absolument irrésistible et franchement hilarant.

Il est aussi la première victime de son honnêteté absolue (qui frôle parfois le syndrome de la Tourette) et de sa foi en la bonté intrinsèque de chaque être humain. Mais rien (ou presque) ne saurait assombrir la nature légère et l’optimisme de ce grand enfant en camisole, qui aime fumer des pétards, jouer aux charades en famille et lire des livres sur l’aromathérapie.

Enfin libre après un passage en prison – il a été arrêté pour un crime aussi stupide que charitable –, notre héros est interdit de séjour par sa blonde sur la ferme de culture biodynamique où il vivait jadis avec son chien Willie Nelson. Sans boulot ni endroit où loger, il trouve refuge auprès de sa mère et de ses trois sœurs, plus attristé par la perte de son chien que par la perte de sa compagne.

Il créchera d’abord chez Liz (Emily Mortimer), sa grande sœur mariée à un cinéaste rabat-joie et pédant (Steve Coogan). Ce couple de bobos new-yorkais juge néfaste l’influence de tonton Ned sur leur fils aîné River, avec qui il partage une passion pour les films d’action et des mouvements d’arts martiaux appris sur YouTube.

Ned échouera donc chez Miranda (Elizabeth Banks), journaliste ambitieuse qui espère faire sa marque dans les pages de Vanity Fair. Mais quand, en désespoir de cause, elle devra demander à son frérot de lui servir de chauffeur, pour l’accompagner à une interview importante, Ned se trouvera à nouveau dans le pétrin en raison de son sens de l’intégrité clairement incompatible avec la soif de scoops de sa frangine.

Ce qui l’amènera à gîter dans le loft que sa sœur bisexuelle hipster Natalie (Zooey Deschanel) partage avec sa compagne Cindy (Rashida Jones) et une demi-douzaine de colocs. Ned aura le soutien de Cindy pour récupérer la garde de Willie Nelson, mais se mettra encore une fois les pieds dans les plats en ratant ses initiations à l’amour à trois et à la thérapie de groupe dans un « sweat-lodge ».

Comédie intelligente, sans prétention et portée par des acteurs inspirés, Our Idiot Brother combine un humour à la «Funny or Die» à une fine analyse des archétypes sociaux contemporains. Dans la lignée des 40 Year Old Virgin, Bridesmaids et autres (trop) rares réussites comiques produites par Hollywood, ce régal signé Jesse Peretz nous laisse avec un brin d’espoir en l’humanité, un grand sourire et, dans la tête, des airs de Willie Nelson.

Our Idiot Brother: comédie de Jessee Peretz. Avec Paul Rudd, Emily Mortimer, Elizabeth Banks et Zooey Deschanel.