Projeté hier à la Mostra de Venise dans la section «Journée des auteurs», Continental, un film sans fusil de Stéphane Lafleur a été très bien reçu par les festivaliers. «Ils ont applaudi à la fin. La période de questions qui a suivi a surtout été une période de commentaires... et ils étaient positifs», a indiqué le réalisateur et scénariste joint au téléphone après la projection, durant une réception à laquelle participaient aussi Fanny Mallette et Réal Bossé, deux des acteurs principaux de cette comédie noire.

«Nous nous sommes vite rendu compte qu'il y avait plusieurs érudits du cinéma dans la salle, et ils ont chaudement félicité Stéphane pour la poésie de son film, pour sa maturité», raconte Fanny Mallette qui ne cache pas combien elle «aime ce film, peu importe comment il sera accueilli». Ce, en référence au Festival de Toronto puis au Festival du nouveau cinéma, où il sera présenté avant de prendre l'affiche, en novembre.

Même son de cloche chez Réal Bossé: «J'ai aimé ce film dès la lecture du scénario et plus je le vois, plus je l'aime. Il devient comme un film-ami» - qui s'étonne par contre, en ce premier passage dans un festival de cinéma «autre que celui de Montréal», de la place qu'occupent les blockbusters américains: «Je m'attendais à ce que les films d'auteur soient plus mis en évidence, mais les médias s'intéressent davantage à la présence des stars américaines.»

Nos voisins du Sud ratissent si large - en temps de festival comme en d'autres temps - qu'ils vont jusqu'à teinter «la perception que les Italiens ont de nous. On sent vraiment qu'un océan nous sépare et que pour eux, nous faisons un seul même gros bloc avec les États-Unis», note Stéphane Lafleur qui a pris l'occasion d'afficher sa différence et celle de notre cinéma, à travers ce Continental au ton très personnel: les plans sont fixes; la lumière, naturelle; les sons, fruits du moment et non des effets sonores; les dialogues et les jeux des comédiens, criants de vérité. Pour dire leur solitude. Sans cynisme mais avec humanisme.

«C'est un film qui ne prend pas le spectateur par la main, qui lui laisse beaucoup de place en lui donnant la possibilité d'imaginer ce qui se passe hors du cadre», fait Fanny Mallette. «C'est une comédie noire et violente... même si elle est sans fusil. Et sa réception, ici, montre à quel point nous sommes tous pareils: dès que tu colles à l'humain, tu deviens universel», poursuit Réal Bossé.

Le mot qui revient d'ailleurs dans la bouche de chacun d'eux est «touché». Le public de Venise a été touché. «Et ils ont compris ce que je voulais dire, je l'ai senti dans leurs commentaires», indique Stéphane Lafleur, ravi par la qualité technique d'une projection qui bénéficiait de sous-titres anglais (sur la copie) et de sous-titres italiens (par tableau électronique).

Bref, ce «film sans fusil» ne fait que commencer à faire du bruit.