Le réalisateur québécois, fort du succès de C.R.A.Z.Y., vient de terminer à Paris le tournage de son prochain film, Café de Flore, une oeuvre en deux temps mettant en vedette, côté français, Vanessa Paradis et un attachant enfant trisomique.

La grande tente blanche installée il y a 10 jours le long de la rue du Faubourg Saint-Antoine, au coeur de Paris, pourrait être destinée à une soupe populaire, mais ses occupants n'ont pas la tête de l'emploi. L'équipe du tournage du film Café de Flore, qui occupe les lieux, est venue dîner entre deux prises. Et l'heure est à la fête puisque Marin Guerrier célèbre ce jour-là son 10e anniversaire.

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Une fois le repas terminé, la vedette française Vanessa Paradis et le réalisateur québécois Jean-Marc Vallée font leur entrée avec un gâteau et des cadeaux destinés au jeune garçon trisomique, tout sourire pour l'occasion.

«Tu as un discours à faire, champion du monde?» demande le réalisateur à l'enfant, qui se lève sur un banc et lance quelques boutades à la ronde, l'air taquin, visiblement ravi de l'attention de ce public conquis d'avance.

La veille, dans les vastes studios de cinéma de Bry-sur-Marne, à l'est de la capitale française, le petit Marin était aussi au coeur de l'action. Et de l'attention. L'enfant, qui en est à sa première expérience de cinéma, est omniprésent, tant derrière que devant la caméra. Jean-Marc Vallée le guide, tente de l'amener dans le bon registre, vers le bon geste, parfois en le grondant, plus souvent en l'encourageant.

«Putain, c'est trop beau, ça!» lance-t-il spontanément, en adoptant un juron français au passage pour saluer la captation d'une scène dans laquelle Vanessa Paradis, qui incarne la mère d'un enfant trisomique dans le Paris des années 60, couvre de baisers le garçon après l'avoir durement sanctionné.

Les images sont tournées dans un appartement modeste de Montmartre minutieusement reconstitué en studio par l'équipe du film, coproduction franco-québécoise disposant d'un budget de 10 millions de dollars.

Jean-Marc Vallée et une poignée de ses proches collaborateurs ont fait le saut à Paris il y a plusieurs semaines après avoir tourné à Montréal la première partie de Café de Flore, qu'il décrit comme un «film d'amour épique» comportant deux histoires.

Montréal et Paris

La première, campée à Montréal en 2010, met en scène la rupture amoureuse d'un DJ et ses suites. Celle de Paris montre la bataille d'une mère déterminée envers et contre tout à assurer le bonheur de son enfant handicapé, Laurent. Les deux histoires sont reliées d'une manière «surnaturelle», indique le réalisateur de C.R.A.Z.Y., qui préfère ne pas trop donner de détails avant la sortie du film, prévue en 2011.

«C'est un film qui est une continuation de C.R.A.Z.Y. à plusieurs égards, sur le plan musical, de l'éclatement, du désir de faire un spectacle qui a de la fantaisie, du mystique, de l'émotion», relate-t-il.

Le réalisateur, obsédé de musique, affirme que l'idée du scénario lui est venue d'une pièce intitulée Café de Flore qui lui a inspiré le titre. «Le film est né de mon amour de cette chanson, que j'ai écoutée quand je l'ai découverte en boucle», relate-t-il en entrevue dans l'appartement créé pour le tournage, quelques heures avant son démontage.

«Dans ma façon de faire du cinéma, on sent le musicien frustré (...) qui fait ses films avec la musique qui l'inspire et qui lui donne envie de raconter des histoires», souligne Jean-Marc Vallée.

Les personnages eux-mêmes sont obsédés par la musique, y compris Laurent, qui écoute en boucle le même disque.

Comme le montre le tournage des scènes observées par La Presse, il n'est pas toujours aisé de convaincre le jeune interprète de donner précisément ce qui est recherché.

Le réalisateur a travaillé plusieurs semaines avant le tournage avec le garçon et une autre enfant trisomique, Alice, qui incarne son amoureuse dans le film. Et qui l'est aussi en réalité. «Au début, je n'y arrivais pas (...). Je me suis rendu compte qu'il fallait que je change mes personnages pour qu'ils reflètent ce qu'eux sont dans la vie», relate-t-il.

Une comédienne française chargée d'encadrer le garçon, Sarah Grappin, indique qu'il est «très attentif» au tournage même s'il n'a pas nécessairement conscience de l'oeuvre qui va en découler. «Marin est très heureux, il aime beaucoup Jean-Marc», relate-t-elle.

Vanessa Paradis

Vanessa Paradis s'est aussi beaucoup investie dans la préparation du tournage en côtoyant les enfants. Et elle se montre tout aussi ravie.

«Marin a un côté si pur et si vrai. Et en plus, il est très, très drôle (...). Il a une très forte personnalité. Et il aime prendre les choses en main», relate l'actrice, qui est très inspirée par son rôle de mère.

«C'est une femme et une mère qui protège extrêmement. Et tout ce qui est extrême est nécessairement dangereux», dit l'actrice, qui semblait attristée cette semaine de voir poindre la fin du tournage.

«Il y a une bonne étoile sur ce film-là», souligne Jean-Marc Vallée, qui pense aujourd'hui avoir en main les éléments d'une oeuvre susceptible de plaire encore à un public nombreux «même s'il ne fait pas exprès» pour en arriver là.

«Je n'approche pas le cinéma en me disant: je vais faire du box office. Ce n'est pas ça du tout. Je crée des scénarios et des scènes que j'aimerais voir en film. Je veux me faire plaisir d'abord et là, comme pour C.R.A.Z.Y., je m'éclate comme metteur en scène, comme amoureux du cinéma, de la musique», relate le réalisateur.

«J'espère que tout l'amour que j'ai à faire ce travail va transcender et que le public va apprécier. J'ai vraiment le souci de vouloir donner un bon show, ça, c'est sûr», dit-il.