En participant, comme assistant à la direction photo, au film 24 heures ou plus (1973) de Gilles Groulx, Serge Giguère a retenu cette phrase introductive: «Il y a 56 sujets dans ce film. Ce qui prouve, encore une fois, qu'il y a 56 façons de faire un film. Nous avons choisi celle-là.»

Devenu réalisateur, c'est le principe qu'il a appliqué à ses propres oeuvres. Son plus récent opus, Les lettres de ma mère, en est un bon exemple. À travers 120 lettres écrites entre 1947 et 1956 par sa mère, née Antoinette Vézina, à son frère Henri, aîné de 16 enfants, M. Giguère y raconte une autre histoire du Québec.

En plus de raconter sans compromis (certains passages sont durs) l'histoire familiale, ces lettres donnent quelques clés sur l'histoire de sa région natale, Arthabaska, mais aussi celle de Montréal et du Québec.

«J'essaie de faire un bon show»

La singularité de son regard ne s'arrête pas là! Le réalisateur signe une oeuvre éclatée où se mélangent extraits de vieux films, mise en scène avec une comédienne (Hélène Desperrier) interprétant sa mère, lectures en voix off (Muriel Dutil) d'extraits de lettres, décors bricolés à partir de vieilles photos et même un théâtre de poche. C'est festif et divertissant, même dans les passages plus dramatiques.

«Quand je fais un film, j'essaie de faire un bon show, dit le réalisateur de 72 ans en entrevue téléphonique depuis sa région natale, où il s'est récemment réinstallé. Je cherche à créer une structure dramatique semblable à celle d'une fiction.»

Lui qui s'est toujours intéressé à des personnages un peu dans la marge, le voilà qui braque sa caméra sur sa propre mère. Qui est cette Antoinette? «Une femme qui était plus rapide que les gens autour d'elle pour faire les choses, répond-il. Elle avait l'ambition de réussir tout ce qu'elle entreprenait. Et c'était un modèle de partage.»

En salle (Beaubien à Montréal, Cartier à Québec) depuis vendredi.