Presque 40 ans après la sortie du film Rocky, le long métrage Creed de Ryan Coogler renoue avec cette franchise qui fait une belle place aux négligés du ring, confient le réalisateur et les comédiens Michael B. Jordan et Tessa Thompson. La Presse les a rencontrés.

Ryan Coogler, Michael B. Jordan et Tessa Thompson ont une chose en commun face au long métrage Rocky: ils n'étaient pas nés lorsque l'oeuvre écrite par Sylvester Stallone et réalisée par John G. Avildsen a fait un tabac en 1976, gagnant trois Oscars, dont celui du meilleur film.

Leur admiration pour l'oeuvre et leur affection pour l'acteur et scénariste Stallone semblent n'en être que plus grandes. C'est l'impression qui se dégage d'une rencontre de presse tenue avec le réalisateur et deux des principaux interprètes de Creed qui s'est déroulée il y a deux semaines dans un gymnase de boxe du centre-ville de Toronto.

«À mon avis, le premier Rocky est un des meilleurs films américains consacrés aux «donnés perdants» (underdogs), lance Tessa Thompson. Le public des films Rocky recherche de telles personnes qui nous rappellent que la détermination et la persévérance ouvrent de grands horizons.»

Creed est rien de moins qu'une relance de la franchise Rocky. Au coeur de l'histoire, on y retrouve Adonis Creed-Thompson (Jordan), fils du grand Apollo Creed. Il n'a pas connu son père biologique, mais porte en lui l'ADN du boxeur et une rage de vaincre. Sa vie, il la voit sur le ring.

Déterminé à suivre son chemin, Adonis s'installe à Philadelphie et convainc un vieil entraîneur à la retraite de le prendre sous son aile. Son nom: Rocky Balboa (Sylvester Stallone). Et entre deux séances de boxe, il se rapproche de plus en plus de Bianca (Tessa Thompson), séduisante chanteuse indépendante d'esprit.

On peut difficilement s'abstenir de faire un parallèle avec Adrian, l'amour de Rocky.

«Bianca est davantage qu'un apport d'énergie et de confiance pour Adonis, dit Tessa Thompson. Ce serait injuste de la confiner à ce rôle. Elle cherche aussi sa voie. C'est une guerrière solitaire qui cherche à aller plus loin dans sa carrière. Comme Adonis dans le ring. Lorsqu'ils se rencontrent, on espère qu'ils vont se compléter et se rendre meilleurs l'un l'autre, comme naguère Rocky et Adrian. Mais ils vont le faire en traversant des zones de turbulences.»

Effet tonique

Le regard que porte le réalisateur Ryan Coogler (Fruitvale Station) sur le film original et son interprète rejoint celui de Tessa Thompson. Chez lui, les films Rocky étaient consommés pour leur effet tonique.

«Mon père regardait les films de Sly [Stallone] à une époque très difficile de sa vie, raconte-t-il. Il était encore enfant et sa mère a reçu un diagnostic de cancer du sein. On lui a dit qu'elle vivrait un an. Elle en a vécu huit. Mon père a passé à travers cette période en regardant encore et encore les films. Il pleurait aux mêmes passages. Plus tard, il me les faisait regarder en boucle lorsque j'avais un gros test à l'école ou une partie de football importante.»

Coogler est conscient de la lourde responsabilité qu'il s'impose en entreprenant de relancer la franchise Rocky. À l'image d'Adonis qui se fait insistant auprès de Rocky afin qu'il reprenne du service, il lui fallait convaincre Stallone de se remettre dans la peau du boxeur à la retraite. Ce qui n'était pas un détail!

«Nous l'avons convaincu de reprendre son rôle en avançant plusieurs arguments, dit le réalisateur. D'abord, en lui montrant que la courbe des personnages est différente. Rocky, ici, n'est plus au coeur de l'histoire. Ailleurs, je voulais coller à un élément du premier film, celui de l'identité. Le héros, ici, se demande s'il est un dur ou non et quelle place il aura dans la société.»

Dans les notes de presse remises aux médias, Stallone, qui n'était pas à Toronto, indique avoir toujours eu la volonté de conserver intact le personnage de Rocky en raison de l'impact qu'il a eu sur le public. Il a donc accueilli les premières démarches de Coogler avec un certain scepticisme, mais a vite été intrigué et captivé par l'idée d'introduire le personnage d'Apollo. Au fil d'arrivée, Stallone ne s'est pas contenté de jouer dans le film. Il en est devenu l'un des producteurs.

Chaos ordonné

Pour interpréter Adonis, Cooger a fait appel à Michael B. Jordan, qui défendait le rôle central d'Oscar Grant dans le long métrage Fruitvale Station. Le jeune comédien dit s'être lui aussi projeté dans le personnage de négligé de Rocky à l'école secondaire.

Jordan s'est soumis à un long et lourd entraînement de 18 mois pour incarner son personnage. «Ryan m'a pris en charge et je me sentais en confiance, dit-il. Il a fallu dix-huit mois d'entraînement pour arriver là où nous le voulions. Ça s'est fait graduellement avec différents entraîneurs et mon corps s'est peu à peu transformé.»

Avancées technologiques obligent, il était difficile, voire impossible, de constamment feindre le combat. «Dans le ring, c'était intense. C'était une forme de chaos ordonné, lance Jordan. Nous avons mis des mois à chorégraphier les combats. Et, oui, j'ai pris quelques coups. Notamment pour les scènes tournées au ralenti. Mais Sly était toujours dans les parages, et comme c'était la personne la plus expérimentée, il a été d'une très grande aide.»

Sly, tout le monde l'a visiblement aimé sur le plateau de Creed. «Il est comme Rocky: adorable, dit Tessa Thompson. Creed était le premier film de la série qu'il n'a pas scénarisé et j'ai été impressionnée par sa façon de passer le flambeau. Il aurait pu arriver sur le plateau et vouloir prendre les commandes. Au contraire, il a laissé les choses aller avec grâce, humilité et un grand sens de l'humour.»

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Creed prend l'affiche le 25 novembre.