Devant la caméra de Lasse Hallström, la royale Helen Mirren dirige un grand restaurant du sud de la France «menacé» par l'arrivée d'une famille indienne, dont le patriarche haut en couleur est incarné par Om Puri. Incursion dans les coulisses d'un choc des cultures. Et des cuisines.

Prenons le soufflé. Un plat qui doit paraître léger, mais qui doit aussi posséder une certaine consistance pour ne pas s'écraser. «Eh bien, à mes yeux, ce film est un extraordinaire soufflé. Sous des dehors de légèreté, il aborde des thèmes on ne peut plus graves.»

Ainsi parlait Helen Mirren lors d'une rencontre de presse à Los Angeles en marge de la sortie de The Hundred-Foot Journey de Lasse Hallström. Et quand Dame Helen parle, on l'écoute avec bonheur. On déguste ses réponses. On se réjouit de son humour. Anglais, oui. Mais qui fait mouche en toutes circonstances.

Basé sur le best-seller de Richard C. Morais et produit par Steven Spielberg et Oprah Winfrey, The Hundred-Foot Journey se déroule dans le village français de Saint-Antonin-Noble-Val, qui, entre autres attraits, abrite un restaurant étoilé, Le Saule pleureur, appartenant à Mme Mallory (Helen Mirren), qui gère sa cuisine et ses cuisiniers - dont une sous-chef talentueuse, Marguerite (Charlotte Le Bon) - d'une main de fer.

Le ronron quotidien des lieux en général et de l'établissement culinaire en particulier est perturbé par l'arrivée de la famille Kadam, qui ouvre son propre restaurant de l'autre côté de la rue où se trouve Le Saule pleureur. Aux fourneaux de La Maison Mumbai, Papa (Om Puri) et son fils, Hassan (Manish Dayal), qui possède en cuisine l'équivalent de l'oreille absolue chez les musiciens.

«Je considère cette histoire comme une fable, explique le réalisateur Lasse Hallström (Chocolat, Dear John). Sous des dehors de légèreté, on y évoque les tensions qui existent en France... et pas seulement en France.» Soit partout où les cultures se rencontrent, mais n'arrivent pas à se «parler». Autrement dit, un peu partout sur la planète.

L'attrait de l'autre

C'est ce qui a attiré Helen Mirren, pour qui «''Aime ton prochain'' est probablement le commandement le plus difficile à appliquer». Pour Charlotte Le Bon, qui vit aujourd'hui en France et constate que les frontières se referment, «on refuse de voir combien on peut s'enrichir grâce à la culture de l'autre». Quant à Manish Dayal, né aux États-Unis de parents indiens, il estime que The Hundred-Foot Jouney «montre que les tensions raciales vont dans les deux sens: les deux camps sont coupables à certains égards et ont raison sur d'autres».

Et puis, il y avait la cuisine. La cuisine en tant qu'art. Comment, ou pourquoi, résister! D'autant que, pour les acteurs concernés, le parallèle est maintenant facile à tracer entre le métier de chef et celui de comédien. «J'ai compris en faisant ce film que les grands chefs, comme les grands écrivains, les grands musiciens, les grands peintres, sont des artistes, dit Helen Mirren. Tous doivent choisir les éléments qu'ils vont combiner pour créer un livre, une symphonie, une toile, un plat. Ils partagent le même genre d'obsessions.» Et une même quête d'originalité.

Si elle se dit gourmet, voire gourmande, la grande actrice préfère «l'idée de cuisiner» que cuisiner comme tel: «J'aime les livres de cuisine, les émissions culinaires. Mais faire les courses, trouver de la place dans le réfrigérateur et les placards, ranger tout ce qu'on a acheté pour plus tard laver, peler, couper, préparer et, enfin, devoir tout nettoyer... tout ça pour un «Oooh, c'est bon!», ce n'est pas vraiment pour moi. Mais manger ce que quelqu'un d'autre a préparé, ou déguster un grand vin...» Soupir.

Et de raconter sa première fois. Elle avait la vingtaine, et un boyfriend très riche. Grâce à lui, après des années de piquettes partagées avec les copains copines pendant les études, elle a goûté à un grand cru. «Ç'a été une révélation. Je vous jure, cette première gorgée! J'ai eu un orgasme, s'esclaffe-t-elle. Et ce qui est terrible, c'est que ce n'est jamais pareil les fois suivantes.»

Irrésistible à l'écran, Helen Mirren l'est plus encore en personne. Et comme pour les grands vins, l'âge lui sied à merveille.

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The Hundred-Foot Journey (Le voyage de cent pas) prend l'affiche le 8 août.

Les frais de voyage ont été payés par Walt Disney Studios.