Depuis plus de six ans, Michel Poulette porte à bout de bras le projet de l'adaptation de Maïna, le roman historique de Dominique Demers. Son rêve se concrétise enfin.

Le réalisateur est tombé amoureux du fabuleux destin de Maïna à sa première lecture du roman. Il a d'abord entamé une version pour la télévision (avec le scénariste Pierre Billon), projet qui a été abandonné en cours de route. Puis les deux hommes ont eu l'idée de le faire pour le cinéma. Un film d'aventures, avec des acteurs autochtones, tourné sur les lieux de l'intrigue, au pays des loups et des glaces.

Le rêve de Michel Poulette se réalise: Maïna prend l'affiche vendredi prochain sur plusieurs écrans au Québec, dans deux versions (française et anglaise). Tourné dans l'archipel de Mingan sur la Côte-Nord et au Nunavik, le long métrage est doté d'un budget de 8,5 millions de dollars.

«Un tournage dans le Grand Nord représente plusieurs défis, dit Michel Poulette en entrevue lors d'un visionnement spécial à Kuujjuaq. Il faut déplacer à grands coûts des équipes et du matériel. Les conditions météorologiques sont imprévisibles, la durée d'ensoleillement et la neige représentent des difficultés supplémentaires. Mais sur un tournage, je suis très bien préparé... et calme. Au lieu de m'énerver, j'essaie de trouver des solutions aux problèmes.»

La distribution de Maïna a été un défi en soi. Elle affiche des acteurs qui ont tous en commun d'avoir des racines chez les Premières Nations. C'est le cas de Peter Miller (Lance et compte, Mambo Italiano), dont la grand-mère était montagnaise. L'acteur joue le premier amour de Maïna, défendue par l'actrice métisse établie à Vancouver Roseanne Supernault.

Vaincre la peur de l'autre

Mais que diantre allait faire le réalisateur de Louis 19, La conciergerie et Histoire de famille dans cette galère historico-autochtone?! «Ce qui m'a frappé à la première lecture du roman, c'est comment la peur de l'autre ne date pas d'hier, explique Poulette. J'ai voulu en faire une expérience immersive totale grâce aux images. Et montrer comment des cultures distinctes qui partagent un même territoire ont de la difficulté à se métisser. J'ai donc creusé cette notion en travaillant le scénario avec Pierre (Billon). Pour moi, bien que ce soit un film qui se passe il y a 700 ans, il demeure très contemporain.»

«Quand Michel (Poulette) est venu me voir avec le projet de porter mon livre à l'écran, j'ai tout de suite vu qu'il avait parfaitement compris la raison qui m'a poussée à écrire Maïna, raconte Dominique Demers. J'ai voulu exposer un versant caché de notre histoire qu'on ne nous a jamais appris à l'école. Notre (pré) histoire qui est si riche et porteuse de sens. Tout n'a pas débuté avec Jacques Cartier et les Européens.»

Une histoire d'amour

C'est le dilemme que va devoir relever Maïna. Après une bataille meurtrière entre son clan et celui des Inuits, Nipki, un Innu de 11 ans, est capturé par les Inuits. Pour respecter une promesse faite à la défunte mère de l'enfant, Maïna décide de suivre la piste de ses ravisseurs. Or, elle sera faite prisonnière à son tour avant d'atteindre le Grand Nord. Natak et sa bande la ramènent vers leur pays des glaces. Au bout de ce long voyage, Maïna et Natak tombent amoureux. Ensemble, ils découvrent qu'ils peuvent réinventer le monde! Mais leur transgression choquera.

«Maïna, c'est une page oubliée de l'Histoire, estime Dominique Demers. Et moi, j'ai toujours aimé raconter la face cachée des choses. Même à l'époque où j'étais reporter à L'actualité

La romancière (son plus récent ouvrage, Pour que tienne la Terre, vient de paraître chez Québec Amérique) se dit admirative devant le travail de Poulette: «J'ai retrouvé dans son film l'émotion qui m'a poussée à écrire ce livre durant deux ans de ma vie, dit-elle. J'ai tellement de tendresse pour ces deux peuples. Ils ont survécu avec trois fois rien. Pour moi, Maïna est le plus cadeau parmi toutes les adaptations de mes livres.»

Maïna, de Michel Poulette, prend l'affiche le 21 mars.

Photo fournie par la production