Farid est né en France. Mais dans sa banlieue de Montreuil, il est Algérien. Comme tous ceux qui habitent sa cité d'ailleurs. C'est l'une des belles contradictions des enfants d'immigrés. Étrangers dans leur pays de naissance, étrangers dans leur pays d'origine. Pas toujours facile de faire coexister ses multiples identités...

Donc, Farid (interprété par Tewfik Jallab) mène une vie française à peu près tranquille jusqu'au jour où son père, malade, lui demande de retourner au pays. La raison? La mairie de son village natal veut raser une partie du quartier pour permettre à une entreprise espagnole de réaliser un projet d'oléoduc.

Le jeune homme, qui n'a jamais mis les pieds en Algérie, s'en ira donc dans le village de son père pour tenter d'empêcher la Ville de détruire la maison familiale. Un voyage initiatique qui vire au désastre lorsqu'il se fait chiper ses papiers. Le Français bascule alors dans le camp des clandestins...

La Presse s'est entretenue avec Mohamed Hamidi, ex-professeur d'économie et guitariste à ses heures, qui réalise ici son premier film, coproduit par Jamel Debbouze.

Q: En fait, si je comprends bien, ce sont les émeutes dans les cités parisiennes en 2005 qui vous ont inspiré ce film...

R: Pas directement, même si c'est en partie vrai, parce que c'est à ce moment-là que j'ai écrit pour le Bondy Blog, un blogue citoyen. Mais la véritable origine du film, c'est que l'été précédant les émeutes, j'ai fait un voyage en Algérie, où je n'avais pas été depuis 21 ans. C'est là que j'ai commencé à écrire Né quelque part. Dans le village où mes parents sont nés.

Q: C'est donc un film largement autobiographique?

R: Exactement. Je suis né en France de parents algériens. Les événements particuliers ne me sont pas tous arrivés. Je ne me suis pas fait voler mes papiers comme dans le film, mais le retour aux origines, le rapport à ses parents, à l'identité, la réalité des clandestins, ça m'est venu de mon voyage. Je ne pensais pas faire un film au départ. Je voulais simplement écrire cette histoire et peut-être la publier.

Q: Qu'est-ce que vous avez retenu de votre retour au pays?

R: Ce que je retiens, c'est qu'on a des destins assez fragiles, qui sont parfois liés à des choses très aléatoires. Je ne savais pas précisément pourquoi mon père était venu en France. Surtout qu'une bonne partie de la famille est restée là-bas. Mais, comme dans le film, c'est mon oncle qui devait partir et pas mon père. Et j'ai un cousin qui a toujours voulu venir en France. La vérité, c'est que j'aurais dû naître en Algérie.

Q: Vous avez coécrit le scénario avec Alain-Michel Blanc (Va, vis et deviens). Quel a été son rôle?

R: Moi, j'ai écrit un récit de 90 pages, qui était notre base de travail. Mais comme je n'avais jamais écrit de scénario pour le cinéma, j'ai fait appel à Alain-Michel, qui m'a aidé à structurer cette histoire en séquences. On est allés en Algérie, dans mon village d'enfance (Nedroma), il a rencontré ma famille, on s'est imprégnés de tout ça, puis on a tourné le film au Maroc.

Q: Parlez-moi de Jamel Debbouze qui joue le rôle du cousin de Farid et qui coproduit le film. Comment l'avez-vous embarqué dans ce projet?

R: J'ai connu Jamel au Comédie Club où je composais la musique des spectacles. Il a lu mon récit de voyage et m'a ensuite demandé de mettre en scène ses spectacles. Là-bas et au Marrakech du rire. Quand j'ai décidé de faire un film, c'est naturellement que j'ai pensé à lui pour jouer le rôle du cousin. Il amène son jeu d'acteur et sa précision, il amène aussi de la visibilité. Faire son premier film avec Jamel Debbouze, ça aide!

Q: On dit qu'on ne sort jamais son premier film avant d'avoir écrit le second. C'est votre cas?

R: Oui, c'est mon cas! Je suis en train de terminer l'écriture d'un deuxième film qui s'appelle La vache. C'est l'histoire d'un paysan algérien qui traverse la France à pied avec une vache pour participer au Salon de l'agriculture. Ce sera une comédie avec un fond social et politique. Le personnage principal sera interprété par Fatsah Bouyahmed (celui qui répond au téléphone dans Né quelque part). On va tourner l'année prochaine. Jamel coproduira encore le film et jouera certainement dedans.