For a Good Time, Call... est le lieu de toutes les premières. Premier long métrage de Jamie Travis, premier rôle principal pour Ari Graynor, premier scénario porté à l'écran pour Katie Anne Naylon et Lauren Anne Miller. Rencontre avec un quatuor qui n'a pas qu'un fil téléphonique comme corde à son arc.

«Vous ne pouvez pas laisser un hétéro réaliser ce film.» Les mots ont jailli de la bouche de Jamie Travis, et ils sont maintenant un détour obligé lors des entrevues qu'il enchaîne à quelques jours de la sortie de For a Good Time, Call...

Rencontré à Toronto, le réalisateur canadien qui s'est fait connaître par ses courts métrages (The Saddest Boy in the World) assume ses propos en riant: «Je ne suis habituellement pas aussi confiant. C'est le discours du gars qui voulait vraiment avoir le job.» Il nuance toutefois: «Je ne dis pas qu'un hétéro n'aurait pas été capable de faire du bon boulot, mais je savais que je pouvais en faire de l'excellent. J'ai lu ce scénario et je le comprenais; je comprenais les femmes qu'on y croise parce que je connais ces femmes-là. Et en tant que réalisateur gai, à mon sens, j'avais la bonne distance pour porter cette histoire à l'écran.»

Il en a convaincu les auteures du scénario, Katie Anne Naylon et Lauren Anne Miller, qui lui ont donc confié le fruit de leur première collaboration. Lequel, indique Mme Miller, a été construit suivant le proverbial «écris sur ce que tu connais».

Les deux jeunes femmes se sont rencontrées à l'université, où elles ont partagé une chambre sur le campus. Katie étudiait en écriture; Lauren, en art dramatique. Ça n'a pas cliqué sur-le-champ. «J'ai demandé où se trouvait le bac à recyclage et, tout de suite, elle m'a surnommé Earth Girl», se souvient Lauren qui, elle, regardait d'un drôle d'oeil le boulot qu'exerçait sa coloc: «J'avais besoin d'argent et les appels érotiques étaient un bon moyen d'en gagner tout en étudiant», dit en riant Katie avant d'avouer qu'à l'époque, elle était encore vierge et n'avait aucune idée de ce qu'elle racontait à ses clients.

Pas une autobiographie

Bref, quand elles se sont assises pour écrire un scénario, il y a trois ans, les deux femmes sont remontées aux origines de leur amitié. Elles l'ont simplement transposée plus tard sur la ligne de vie des personnages - qui portent leurs prénoms, mais qui ne sont pas des portraits d'elles. Distinction parfois ardue à faire puisque Lauren Anne Miller a décidé qu'elle serait l'interprète de Lauren dans le film. Après tout, elle est comédienne: on l'a entre autres vue dans 50/50 et Superbad.

Katie Anne Naylon, humoriste et auteure, a préféré rester derrière la caméra. Mais elle avait un nom et une voix en tête pour le personnage de Katie: Ari Graynor (Mystic River au grand écran, The Sopranos et Fringe au petit), dont la performance dans Nick&Norah's Infinite Playlist l'avait marquée. «Elles m'ont envoyé le scénario, accompagné d'une vraie lettre d'amour. D'abord, j'ai été flattée. Puis, j'ai lu le texte et j'ai été emballée», raconte la comédienne. Qui a répondu par une autre lettre d'amour et d'acceptation.

Tourné en 16 jours pour moins de 2 millions, For a Good Time, Call... suit donc deux colocs «obligées» que tout sépare: la brune et sérieuse Lauren, qui rêve de faire carrière dans l'édition; la blonde et explosive Katie, qui fait des appels érotiques pour payer le loyer... et qui entraînera Lauren à marcher sur ce fil (téléphonique) où les mots sont crus - et les situations, hilarantes.

«Il y a une face sombre à ces appels érotiques, et elle a été exploitée au cinéma. Je pense à Jennifer Jason Leigh avec ses bébés, dans Short Cuts. Mais nous ne voulions pas aller là», indique Jamie Travis.

«Notre histoire est plutôt celle d'une amitié entre deux filles qui cherchent leur voie, avec un service de téléphone rose en guise de toile de fond», poursuit Lauren Anne Miller. Comme ses complices, elle ne voulait pas, pour les conversations téléphoniques, écrire des échanges «sursexualisés ou émoustillants». Explicites, oui. Crus, oui. Oh que oui et oui. Mais amusants aussi.

Pour jouer ce jeu-là, plusieurs connaissances du quatuor ont accepté d'incarner les clients. Kevin Smith, par exemple. Ou Seth Rogen, mari de Lauren Anne Miller. Quant à Jesse, le grand ami gai des deux filles, celui qui joue les entremetteurs entre elles, il est campé par Justin Long, un copain d'Ari Graynor qu'ils avaient pressenti pour jouer un autre des «abonnés» au service de Katie: «Non, non! aurait-il répondu. Je veux être Jesse.» Et Jesse il est devenu.

Ensemble, ils livrent ce que Jamie Travis voit comme «une célébration de la sexualité féminine, de l'indépendance féminine et de l'amitié féminine». Un film, conclut Lauren Anne Miller, «pour toutes ces femmes qui vont au cinéma avec leurs copines, et pas seulement avec leur amoureux pour voir The Hangover ou Spider-Man 14».

Sex and the City et Bridesmaids feraient-ils des petits?

For a Good Time, Call... (Le téléphone rose) prend l'affiche le 14 septembre.

Les frais de voyage ont été payés par Alliance Vivafilm.