Comme pour les deux premiers films de la trilogie, 1991 est inspiré de mésaventures vécues par Ricardo Trogi, auxquelles le réalisateur a ajouté quelques pincées d'éléments fictifs.

Ricardo Trogi reste fidèle à lui-même. Comme dans ses deux précédents opus autobiographiques, le socle de 1991 est coulé avec sa propre histoire qu'il a saupoudrée de quelques pincées d'éléments fictifs et de beaucoup d'autodérision. En entrevue avec La Presse<, le cinéaste évoque l'avant, le pendant et l'après 1991, année où il a franchi le cap des 21 ans. Celle de la maturité internationale. Pour le meilleur et pour le pire.

L'histoire de 1991 se résume aisément. Jeune adulte, Ricardo (Jean-Carl Boucher) est follement amoureux de Marie-Ève Bernard (Juliette Gosselin). Lorsque cette dernière lui annonce qu'elle part en Italie pour suivre des cours d'été à l'Université de Perugia (Pérouse), en Ombrie, le jeune homme, n'écoutant que son coeur et un peu trop ses fantasmes, quitte précipitamment sa famille et sa chère ville de Québec pour la rejoindre. Dès lors, sa vie va drôlement se compliquer...

«En 1990, au cours d'un voyage dans le Maine, à Kennebunkport ou Portland, j'ai rencontré une fille que j'ai aimée, raconte le cinéaste. Nous étions quatre ou cinq gars de Québec, tous entassés dans une Honda Civic 1988. Nous y avons très mal dormi le premier soir, avant de nous trouver un motel miteux avec un tapis un peu humide. Nous avons rencontré des filles de Montréal dont une m'a beaucoup plu.»

Dans la réalité, ce n'est pas en Italie, mais à Montréal que le vrai Ricardo, le coeur gonflé d'espoir, est venu s'installer pour se rapprocher de cette jeune aimée. Et se rendre compte que cet intérêt n'était pas réciproque.

«Je suis retourné à Québec et, de là, je suis parti en Italie, dit-il. Toute l'année que j'ai souffert à cause de cette femme, je l'ai transposée en Italie, dans un cadre plus joli. Et puis, si elle m'avait demandé d'aller la rejoindre là-bas, j'y serais allé. Alors ce n'est pas de la fiction tant que ça!»

Août 1991. Ricardo Trogi débarque à Perugia, plus exactement à l'Università italiana per stranieri, comme on peut le lire sur sa carte d'étudiant. À peu près toutes les situations, dont la perte de ses papiers, à peu près toutes les rencontres dans le film, Ricardo les a vécues. Et comme son personnage dans le film, notre homme n'est pas un exemple d'assiduité et de ponctualité.

«Je m'y suis inscrit pour étudier la langue, raconte le cinéaste. J'avais un mois de cours et je suis allé à un seul. Les cours commençaient trop tôt alors que le soir, j'étais trop occupé à faire la fête. Ce lieu que les jeunes de Perugia fréquentent dans le film est celui où je passais mes soirées. Finalement, l'italien, je l'ai appris dans la rue.»

La famille est toujours présente dans les films de Ricardo. Et en 1991, elle se décline sur deux continents, à Québec et en Italie. À Québec, la mère Claudette, la soeur Nadia et le père Benito, avec qui le jeune Ricardo pose ici, s'inquiètent du sort du jeune homme. Notamment lorsque ce dernier perd tous ses papiers et son argent.

Sa mère Claudette est particulièrement en feu. À tel point que, dans le film, le personnage de Ricardo la surnomme «l'hystérique». Rien de moins!

«On ne change pas de caractère et Claudette reste Claudette, analyse Sandrine Bisson, son interprète. Je ne pense pas qu'elle prend un café normalement! Elle doit toujours avoir des opinions, des choses à dire. Oui, elle est hystérique, mais le film veut ça.»

Photo fournie par Ricardo Trogi

La carte d'étudiant de Ricardo Trogi à Perugia

En Italie, Ricardo Trogi retrouvera la famille de son père. On l'évoque brièvement dans le long métrage lorsque le personnage de Ricardo perd ses papiers et que son père lui dit d'appeler son frère. Dans la réalité, après son mois passé à Perugia, Trogi est effectivement allé voir sa famille paternelle à Sassuolo, dans la province de Modène et dans la région d'Émilie-Romagne. Il y a retrouvé sa cousine Simonetta (devant sur la photo), les deux filles de cette dernière, sa tante Rosie, soeur de son père, et son oncle Aldino (absent de la photo).

Mais plus que tout, Ricardo allait trouver là un vieil oncle dont il allait filmer l'histoire qui lui permettra de participer à La course destination monde.

«Lorsque je suis parti en Italie, c'était entre autres en réaction au fait que je n'avais pas été retenu pour La course, se souvient-il. Mais à Sassuolo, j'ai rencontré un vieil oncle qui habitait seul dans une montagne. Il cultivait les châtaignes et vivait dans une maison du XIIIsiècle qui avait appartenu à des jumeaux, dont l'un avait tué l'autre. C'était une histoire fabuleuse!»

Cette histoire, justement, Trogi l'a mise sur pellicule avec sa caméra du temps. Quelques années plus tard, il en a fait le montage et a soumis le film pour La course destination monde. Et cette fois, il a été choisi!

Mais revenons à Québec, en 1991, où Ricardo, après ce premier voyage européen, retourne et s'inscrit à l'Université Laval.

«À l'université, je suis surtout entré dans la Ligue universitaire d'improvisation où j'ai rencontré Patrice Robitaille, Pierre-François Legendre, Jean-Philippe Pearson, François Létourneau, Martin Laroche, Tammy Verge, Stéphane Allard, Myriam Leblanc et Francis Leclerc par la bande. Ces créateurs, cette gang, sont mes grands amis. Mais je revois encore, deux, trois fois par année, ceux de 1987 [du deuxième film]. Même s'ils ne sont pas dans ma discipline, je les aime encore et j'aime retourner, parfois, dans cette énergie-là. J'aime me rappeler d'où je viens.»

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En salle le 25 juillet.

Photo fournie par Ricardo Trogi

Claudette, Nadia, Ricardo et Benito Trogi