Le documentariste Jean-François Caissy s'intéresse aux étapes de la vie. Ainsi, La marche à suivre porte sur l'adolescence. Et met en opposition les ornières imposées par l'école secondaire et la liberté des grands espaces.

Après la vieillesse dans La belle visite, c'est à l'adolescence que le cinéaste Jean-François Caissy s'intéresse dans La marche à suivre.

Le documentaire, qui prend l'affiche après son passage dans plusieurs festivals depuis son lancement à la Berlinale, s'inscrit dans une démarche artistique où le réalisateur entend filmer les différentes étapes de la vie.

«Mon but, c'est de créer une série de documentaires sur cinq étapes: la vieillesse, l'adolescence, les jeunes adultes, la petite enfance et l'âge de raison des 40-60 ans. Je trouve ça inspirant.»

Inspirant peut-être, mais sans ligne éditoriale. De sa voix posée, Caissy soutient qu'il ne fait pas de films à thèse. «Je n'ai pas de point de vue à défendre. C'est uniquement le désir de faire du cinéma qui me nourrit», propose-t-il.

Ça se voit. Le réalisateur filme dans le silence, sans interpositions ou voix off, se laissant bercer par ce qui se passe devant lui. Sa griffe de La belle visite, on la retrouve aisément dans La marche à suivre.

Gaspésien d'origine, Jean-François Caissy a choisi son école secondaire comme lieu de tournage. Une situation qui relève davantage du hasard que d'une décision longuement mûrie, assure-t-il.

«J'ai visité plusieurs endroits au Québec, puis je me suis arrêté à mon ancienne école pour faire de la recherche. En y entrant, les odeurs et les sons de mon adolescence m'ont rattrapé.»

Autorité versus liberté

C'est en participant à une rencontre entre le directeur de l'institution et un élève pour une affaire de discipline et de réussite scolaire que Caissy a mis le doigt sur le bon angle de travail.

«Dans le film, je cherchais à avoir le meilleur contraste possible entre l'encadrement de l'école et la liberté des grands espaces. Mais les adolescents sont durs à filmer. Ils sont hyper conscients de leur apparence, de ce qu'ils projettent. Or, j'ai pu assister à plusieurs rencontres à huis clos où les jeunes font face à une figure d'autorité. En deux minutes, ils oubliaient la caméra et ça me permettait d'entrer dans leur bulle.»

Caissy a le sentiment d'avoir capté les vrais sentiments des jeunes. Ce qui donne des instants saisissants. Derrière leur carapace, les pensées roulent. Comme chez cette jeune femme qui reconnaît à reculons avoir intimidé une camarade de classe et avoue tout de go qu'elle n'aurait jamais accepté un tel harcèlement.

À l'autre bout du spectre, le cinéaste filme les jeunes dans leurs moments de plus grande liberté. Ici, sa caméra est en retrait. Les plans larges nous transportent en pleine nature.

«Au niveau cinématographique, la campagne, la ruralité, permettait de transposer les choses de manière plus intéressante et flamboyante, dit Caissy. En ville, les jeunes vont dans les parcs, et la police peut facilement les disperser. Il y a plus de surveillance. À la campagne, c'est plus facile de voir la liberté adolescente et la transposer en images.»

Chemins

Le fait de tourner en région éloignée permet aussi au cinéaste de jouer avec les représentations métaphoriques des chemins, les voies qui s'ouvrent devant les jeunes. Le film compte une bonne flopée de plans sur des sentiers en forêt, des routes, des ponts, etc.

Quelles voies seront empruntées? Tout cela reste à découvrir et donne un sens au titre du film. «L'adolescence est une période de transition. On a un trajet à choisir. C'est pour cela qu'il y a beaucoup de déplacements, dans tous les sens, dans mon film», conclut M. Caissy.

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La marche à suivre prend l'affiche le 28 novembre.