Abandonné de tous, un garçon de 12 ans quitte Haïti et part à la recherche de sa mère qu'on lui dit morte. Le voyage de Samuel lui fera traverser une partie de l'Amérique, du sud au nord, jusqu'à Montréal. Pour le jeune réalisateur Charles-Olivier Michaud, cet Exil aux antipodes d'une excursion touristique est sans cesse nourri d'une détermination obstinée.

Au marché, dans la rue, au resto, on croise des centaines de personnes immigrantes qui nous sont étrangères, la plupart du temps avec indifférence. Mais au fond, quel est leur parcours?

Depuis le tournage de son troisième long métrage, Exil, Charles-Olivier Michaud (Snow and Ashes, Sur le rythme) assure avoir changé son regard sur l'autre. Bien sûr, il n'arrête pas les gens dans la rue pour savoir qui ils sont, mais il se dit fasciné par l'histoire et peut-être l'exil, géographique comme intérieur, que chacun peut porter en lui.

«Certains ont vécu des périples difficiles, dit le réalisateur. Faire ce film m'a permis de regarder les gens différemment. J'ai eu envie de partager ça avec les spectateurs. Il ne faut pas juger les gens trop vite, mais essayer de se mettre un peu dans leur peau.»

Mettant en vedette Francis Cléophat, dans son premier rôle, Exil suit le parcours de Samuel qui, parti d'Haïti, se traîne jusqu'à Montréal à la recherche de sa mère. Il fera cet itinéraire par bonds, aidé chaque fois par des personnages plus ou moins louches qui seront à la fois anges et démons.

Se fiant à son instinct de survie, Samuel fera la connaissance de Sophie (Julie Le Breton), une travailleuse sociale qui est la bonté incarnée. Incapable de s'abandonner, il choisira un autre chemin que celui qu'elle lui propose.

«Exil est un road movie, une fable réaliste sur un garçon qui cherche sa mère et va devenir un homme, argue Michaud. C'est un essai cinématographique, un récit de voyage du point de vue d'une personne qu'on n'est pas habitué de voir dans une telle situation. Mon personnage part très naïvement sur la route sans savoir comment il va se rendre du point A au point Z, ni ce qui va se passer entre ces deux points. Mais il aura toujours cette détermination obstinée qui l'amènera à la prochaine place.»

Lorsqu'on lui souligne qu'Exil a pour thème central l'abandon, M. Michaud suggère plutôt celui de la dure réalité humaine.

«Vous remarquerez que personne ne s'interroge sur le parcours de Samuel, sur sa présence en des lieux incongrus, dit-il. Tous les personnages qu'il croise vont l'utiliser, le trahir, lui mentir, lui faire du mal. Et lorsqu'il rencontre Julie, il va - à son tour - refuser son aide.»

Francis Cléophat

Dans le rôle principal, Francis Cléophat possédait une présence physique très forte qui compensait son inexpérience du jeu. Charles-Olivier Michaud est enchanté de son travail.

«Samuel étant un personnage de très peu de mots, il lui fallait communiquer beaucoup par ses expressions, son langage corporel, dit le cinéaste. Je voulais donc quelqu'un qui ne soit pas trop naïf, enjoué ou dur, mais avec une étincelle dans les yeux qui le pousse vers l'avant en dépit des obstacles. J'ai vu ça en Francis. Il n'avait que 12 ans, était un peu frêle, mais avait une remarquable confiance en lui. Ça m'a inspiré.»

Fidèle à son habitude, Michaud a fait équipe avec Jean-François Lord à la direction photo. «Lorsque le film s'amorce, c'est coloré et plein de textures. Il y a de la bouffe, toutes sortes de sons, la caméra bouge beaucoup. Mais plus le film avance, plus c'est froid, à l'image du personnage qui devient plus dur, évoque Michaud. Les couleurs deviennent grises, brunes et beiges. La caméra est plus stable...»

Produit par Films du boulevard, Exil met aussi en vedette Maxime Dumontier, Paul Doucet, Lina Roessler, Stephen McHattie et Ralph Prosper. Le tournage s'est déroulé dans les bidonvilles haïtiens de Saint-Domingue en République dominicaine, à New York et au Québec.

Exil sort en salle le 27 juin.