Certes, la salle était gagnée d'avance. Arrivés de Montréal, parents et amis étaient venus nombreux pour encourager l'équipe. Même le Délégué général du Québec, André Boisclair, était présent.

Mais il y a des signes qui ne trompent pas. Et dans le cas de la première mondiale de Withewash, premier long métrage d'Emanuel Hoss-Desmarais présenté hier soir au Festival du film de Tribeca, ces signes étaient positifs à plus d'un titre.

Mettant en vedette l'acteur américain Thomas Haden Church et le Québécois Marc Labrèche, Withewash nous conduit dans l'univers singulier de Bruce Landry (Haden Church), un homme qui se retrouve à la fois prisonnier et dépendant (pour sa survivance) de la chenillette avec laquelle il a mortellement renversé Paul Blackburn (Labrèche), un homme dont il avait fait la connaissance dans de non moins curieuses circonstances.

Pour cette première donc, la salle était remplie et une grande majorité des spectateurs sont demeurés au terme du générique final pour le traditionnel échange avec les membres de l'équipe. Les questions sont peut-être venues timidement, mais la discussion n'en est pas moins allée dans plusieurs directions. Les gens s'intéressaient aux valeurs morales du personnage principal, à la dynamique de travail avant le tournage des scènes ou encore à l'origine de l'histoire écrite par Marc Tulin.

Le comédien Marc Labrèche a bien fait rire les cinéphiles en répondant durant une ou deux minutes à une question avant de conclure en lançant : «Je pense avoir écoulé tous mes mots de vocabulaire en anglais; je vais donc m'arrêter ici.»

Plus tôt, en introduisant le film produit par micro_scope (Incendies, Monsieur Lazhar), le directeur artistique du festival, Frédéric Boyer, a évoqué un «époustouflant thriller venu du Québec».

Au cours d'un entretien accordé à La Presse plus tôt dans la journée, M. Hoss-Desmarais se disait zen quant à cette première. Ceci d'autant plus que la lecture d'un premier compte-rendu l'a visiblement comblé. «Le magazine Time Out New York qui est ma bible lorsque je viens ici a classé le film dans les dix meilleurs du festival», s'est-il réjouit.

Bel équilibre

Faut-il parler de thriller comme Frédéric Boyer le disait? Sans doute. Mais il y a plus. L'oeuvre est un mélange bien équilibré et fort bien construit entre la comédie noire, le thriller et le drame psychologique. Whitewash est traversé de part en part d'un humour noir décapant et délicieux. La montée en crescendo de la détresse psychologique du personnage central est prenante.

Il y a quelque chose des histoires de Sisyphe et de Robinson dans ce film. Prisonnier dans les bois du Québec, Bruce Landry doit apprendre à vivre avec sa culpabilité. La neige, le froid, la forêt et la chenillette sont autant de personnages à part entière agissant de miroir à sa torture intérieure.

Au-delà de l'histoire originale et du travail des deux principaux acteurs, le film met en lumière le talent du directeur photo André Turpin. D'ailleurs, Tribeca lui rend hommage puisqu'il fait partie d'un groupe de cinq directeurs photo de qui le festival trace une biographie et résume la carrière dans une entrevue.

Après Tribeca, Whitewash va être présenté dans plusieurs festivals au cours des prochains mois avant de prendre l'affiche cet automne au Québec.