Viviane Audet, Robin-Joël Cool et Érik West-Millette ont remporté dimanche le Jutra de la meilleure musique originale pour la bande sonore du film Camion. En entrevue, ils expliquent comment ils ont créé une musique épurée à partir d'instruments singuliers.

Un banjolélé, un Wurlitzer, un piano et une «slide bass». Voilà les quatre principaux instruments qui ont servi à la confection de la trame sonore du film Camion de Rafaël Ouellet et qui ont valu le Jutra de la meilleure musique originale à Viviane Audet, Robin-Joël Cool et Érik West-Millette au gala de dimanche soir.

Trois des quatre noms «sonnent» étrange? Ils feraient d'excellents pièges dans une dictée? Ils expriment un certain libertinage sonore? Bien vu! Et attendez de voir le studio et très inspirant capharnaüm de M. West-Millette, situé rue Van Horne, où le trio s'est réuni pour la composition de l'album.

Mais à l'image des trois signataires, la trame sonore est la simplicité et la douceur mêmes.

«La synergie qui s'est manifestée entre nous trois nous a conduits vers une musique très folk et extrêmement épurée. C'est sans percussion, minimaliste. C'est une musique où les instruments sont tout nus», explique Érik West-Millette.

La volonté du réalisateur allait dans cette direction. «À l'exemple d'un gars comme Louis Bélanger (Route 132), Rafaël savait exactement ce qu'il... ne voulait pas, dit M. West-Millette, qui a signé la musique de plusieurs films et a travaillé avec de nombreux artistes, dont Marie-Jo Thério. Rafaël voulait peu d'instruments, pas de batterie, des ambiances. Cela a facilité l'encadrement de notre travail.»

Un instrument, un personnage

Camion raconte l'histoire de Germain (Julien Poulin), un homme dont la vie chavire à la suite d'un accident de la route. Reclus dans sa maison, il reçoit la visite de ses deux fils Samuel (Patrice Dubois) et Alain (Stéphane Breton), ce qui permettra d'enclencher un nécessaire processus de rédemption.

En créant la trame sonore, les musiciens ont associé chaque instrument à un personnage. «Le banjolélé, par exemple, est une conjugaison du banjo et du yukulélé. La sonorité est très folk, très rurale, ce qui nous rapproche du personnage d'Alain. Alors que le son du Wurlitzer est plus près du personnage de Samuel», illustre Robin-Joël Cool.

Viane Audet précise. «Camion est un film de gars, mais je pense que Rafaël Ouellet cherchait une certaine dimension féminine. Je voyais le Wurlitzer comme cet ingrédient féminin. En tant que femme, je trouvais bien d'amener dans notre trio quelque chose de plus dreamy, de plus romantique.»

Musiciens, comédiens et un couple dans la vie, Viviane et Robin-Joël sont également à la tête du groupe Mentana. C'est en enregistrant une pièce pour ce groupe qu'ils ont découvert le Wurlitzer, piano à lames de métal utilisé par des artistes tels Ray Charles, Sam Roberts, Damien Robitaille et plusieurs groupes des années 70.

«J'ai eu un coup de coeur immense pour cet instrument, dit Viviane Audet. Il nous a guidés dans la musique de Camion et a servi de liant entre tous les instruments.»