Les films indépendants sont plus représentés que jamais aux Oscars, même s'ils ne représentent pas le goût du grand public qui privilégie les grosses productions à suspense ou d'action.

Cette année, sept titres sur huit en lice pour le prix du meilleur film n'ont pas été produits par des studios.

C'est le cas des favoris Birdman, écrit, produit et réalisé par le mexicain Alejandro Inarritu pour quelque 18 millions de dollars, et Boyhood, film unique tourné sur douze années avec les mêmes acteurs, de Richard Linklater, qui a coûté 4 millions de dollars.

Une goutte d'eau par rapport aux 100 à 200 millions de budget des films ayant rapporté les plus grosses recettes l'an dernier, et produits par les studios, à l'instar d'Interstellar (Warner Bros.), Big Hero 6 (Disney), Hunger Games: La révolte, partie 1 (Lionsgate), Les Gardiens de la galaxie (Marvel/Disney), Captain America: le soldat d'hiver (Marvel/Disney), ou Le Film Lego (Warner Bros.).

Ils ont récolté au moins 200 millions de dollars rien qu'en Amérique du Nord.

Par comparaison, Boyhood et Birdman n'ont rapporté que respectivement 44 et 72 millions de dollars dans le monde entier.

Parmi les autres films candidats à l'Oscar du meilleur film, Whiplash et Selma ont gagné encore moins. The Theory of Everything a fait mieux (98 millions) et The Grand Budapest Hotel beaucoup plus (174 millions), mais c'est encore loin des performances des blockbusters de l'année.

«La plupart du temps les "films à Oscars" sont des projets très personnels avec des rôles consistants pour les acteurs, mais pas nécessairement un large succès en salles», remarque Jeff Bock, analyste de la société spécialisée dans le box-office Exhibitor Relations.

Rester dans la culture populaire 

Il y a une dizaine d'années, les «blockbusters» hollywoodiens étaient plus fréquemment récompensés par l'Académie: Le Seigneur des anneaux: Le Retour du roi (2003) et Gladiator (2000), Titanic (1997).

Ces dernières années, le vote des membres de l'Académie des sciences et arts du cinéma, qui décerne les statuettes, s'est orienté vers les indépendants comme No country for old men, Slumdog Millionaire ou Le Discours d'un roi.

American Sniper, de Clint Eastwood, fait figure d'exception cette année. C'est le seul film de studio (Warner) présent dans la course à l'Oscar du meilleur film. Il est en lice dans six catégories d'Oscars au total.

Il cartonne au box-office avec déjà 400 millions de dollars de recettes depuis sa sortie le jour de Noël, dont 300 millions rien qu'aux États-Unis et au Canada. Son budget de 60 millions de dollars le place à la lisière du budget d'un indépendant et d'une grosse production.

Alors que le compte à rebours a commencé avant la soirée des Oscars dimanche, le goût des spectateurs américains s'est de nouveau illustré ces derniers jours avec le triomphe au box-office de Cinquante nuances de Grey, romance érotique étrillée par la critique mais qui a amassé 266 millions de dollars dans le monde en seulement quatre jours.

Dans l'histoire des Oscars, c'est Avatar, mega production de science-fiction de James Cameron ayant généré 2,8 milliards de dollars au box-office dans le monde, qui détient le record de recettes pour un film candidat.

Mais l'année où il était dans la course, en 2009, c'est Démineurs, de Kathryn Bigelow, sur un démineur de l'armée américaine en Irak, qui avait décroché la statuette dorée. Il n'avait engrangé que 49 millions de dollars de recettes mondiales.

Les autres gagnants des récentes années comme Crash (2006), No Country for Old Men (2008), The Artist (2012) et Twelve years a slave (2014) n'ont pas non plus brillé au box-office.

Ce qui rend la soirée des Oscars d'autant plus importante pour les films indépendants: «Ces prix sont l'occasion de promouvoir le cinéma indépendant. Ils sont importants parce qu'ils donnent à ces films la possibilité de continuer à faire partie de la culture populaire», a ainsi fait remarquer Ethan Hawke, qui joue dans Boyhood, en apprenant qu'il était nommé.