« Et l'Iris va à... » C'est cette phrase que nous entendrons le 4 juin 2017 lors du prochain gala des prix du cinéma québécois. Après le décompte d'un vote populaire qui a duré huit jours, la direction de Québec Cinéma a confirmé jeudi à La Presse que le nom que portera le trophée remis aux gagnants sera Iris.

« Nous sommes très heureux de ce choix, a dit Ségolène Roederer, directrice générale de Québec Cinéma. Plusieurs milliers de personnes venant du public et des professionnels du milieu ont participé à ce vote qui s'est déroulé sur notre site internet. »

Les gens étaient appelés à trancher entre deux noms, soit Iris et Lumi. Ces deux propositions émanaient de séances de remue-méninges que l'équipe de Cinéma Québec a menées avec des gens du milieu des arts, des communications et du cinéma au cours des derniers mois. Ségolène Roederer a tenu à dire que le choix du nom d'Iris a obtenu 65 % des votes.

Dans la présentation du nom Iris, on précisait que l'iris versicolore est l'emblème floral du Québec. Il est aussi le disque coloré de l'oeil. Plusieurs se sont également souvenus que lors de l'unique édition du Festival international du film de Montréal (FIFM), organisé par la firme Spectra en 2005, on a remis des prix appelés Iris aux meilleurs films de la compétition internationale.

Ce changement de nom fait par Québec Cinéma a été rendu nécessaire à la suite de ce qui est convenu d'appeler aujourd'hui « l'affaire Jutra ». En février dernier, une biographie de l'auteur Yves Lever a laissé peu de doutes quant au caractère pédophile du cinéaste. Des témoignages de victimes publiés dans La Presse ont confirmé que le réalisateur de Mon oncle Antoine et de Kamouraska avait eu des comportements de nature pédophile avec de jeunes garçons âgés de 12 ans et moins.

Le 17 février, Québec Cinéma a annoncé qu'il retirait le nom de Jutra de son trophée. Un long processus a ensuite eu lieu afin de rebaptiser la statuette. La prochaine étape sera maintenant de choisir parmi trois sculpteurs celui ou celle qui aura l'honneur de concevoir le trophée qui sera remis aux lauréats. Nous devrions connaître l'allure de ce trophée en février prochain.

UN GALA EN JUIN QUI DÉÇOIT LE MILIEU

Dans la foulée du processus de changement de nom du trophée, nous avons appris que le Gala Québec Cinéma aura lieu en juin prochain, plutôt qu'en mars comme c'est le cas depuis des années. Cette décision prise par la direction de Québec Cinéma, conjointement avec celle de Radio-Canada, est mal accueillie par le milieu du cinéma.

Dans une lettre ouverte signée par 106 artisans du cinéma, dont les cinéastes Xavier Dolan, Denis Villeneuve, Louis Bélanger, Louise Archambault et Léa Pool, les signataires jugent que ce changement va desservir l'industrie du cinéma québécois.

Alors que la directrice générale de la télévision de Radio-Canada, Dominique Chaloult, défend cette décision en affirmant que ce nouveau calendrier saura « maximiser l'impact et la visibilité » du gala, « tout juste après Cannes et avant les films de l'été », les signataires se demandent si c'est « vraiment rendre service au milieu du cinéma québécois que de le confiner [le gala] au désert télévisuel du mois de juin ».

De plus, les auteurs de la lettre craignent que les téléspectateurs n'aient plus en mémoire les films sortis en salle un an et demi plus tôt puisque les oeuvres jugées devront avoir été présentées entre janvier et décembre de l'année précédente.

Le président du conseil d'administration de Québec Cinéma, Patrick Roy, et la directrice générale de l'organisme, Ségolène Roederer, ont réagi à cette lettre en réitérant leur « enthousiasme face à ce changement de calendrier ». Selon eux, cette décision « va dans le sens du renouveau » pour assurer à cette « célébration le succès qu'elle mérite ».

Les deux dirigeants précisent que c'est à leur demande que Radio-Canada a proposé une nouvelle date de diffusion. Ils demeurent convaincus que ce changement de calendrier sera « une façon de [s']assurer d'un meilleur potentiel d'écoute, en distançant la soirée de la forte compétition télévisuelle du dimanche soir pendant tout le printemps ».

Dominique Chaloult n'a pas souhaité commenter davantage cette décision et a décliné la demande d'entrevue de La Presse.