Harvey Weinstein, le magnat d'Hollywood accusé d'harcèlement sexuel et de viols, est désormais visé par une enquête policière à New York et au Royaume-Uni, prélude à une probable grande saga judiciaire en Amérique.

Les investigations de la police new-yorkaise se cantonnent pour l'instant à une agression sexuelle présumée remontant à 2004.

L'enquête de la police britannique concerne elle une agression sexuelle qui aurait été commise dans les années 1980 dans la région de Londres.

Mais les choses ne devraient pas s'arrêter là, le producteur étant suspecté d'avoir sévi durant plusieurs décennies, obtenant à chaque fois que c'était possible le silence de ses victimes grâce à des accords de confidentialité grassement payés.

Pour la première fois depuis que le scandale a éclaté, l'homme de 65 ans s'est exprimé alors qu'il sortait mercredi après-midi de la maison de sa fille à Los Angeles.

Interpellé par les paparazzi sur son moral, le faiseur de stars a concédé: «Je ne vais pas fort. Mais j'essaie. J'ai besoin de trouver de l'aide».

«Je tiens bon, je fais de mon mieux», a ajouté M. Weinstein, vêtu d'un jean et d'un t-shirt foncé. «On fait tous des erreurs. J'espère une seconde chance», a-t-il poursuivi avant de s'engouffrer dans une grosse voiture de type 4x4.

Selon le site TMZ, le mécène démocrate s'est ensuite envolé pour l'Arizona, où il a intégré un centre de traitement de la dépendance sexuelle.

Depuis les premières révélations du New York Times le 5 octobre, le producteur a vu fondre ses soutiens et a même été licencié par sa propre maison de production, The Weinstein Company.

Faits prescrits, ou pas 

La liste des femmes se disant victimes de ses abus, principalement des mannequins et actrices, ne cesse de s'allonger: Gwyneth Paltrow, Angelina Jolie, Judith Godrèche, Katherine Kendall, Emma de Caunes, Cara Delevingne, Ashley Judd, Léa Seydoux, Mira Sorvino, Florence Darel...

Jeudi, c'est l'actrice britannique Kate Beckinsale qui a raconté que Harvey Weinstein lui avait fait des avances dans une chambre d'hôtel, en peignoir, alors qu'elle n'avait que 17 ans.

«Grâce à Dieu on en parle!», a commenté l'actrice Jane Fonda, qui a confié à la BBC avoir découvert les accusations portées contre Harvey Weinstein il y a un an mais n'avoir pas voulu en parler pour ne pas dévoiler l'identité d'une des accusatrices, une décision qu'elle a dit regretter.

De nombreux faits reprochés au fondateur de Miramax par ces vedettes sont prescrits, car le code pénal local les considère comme des délits mineurs.

Mais trois femmes ont accusé Harvey Weinstein de viol: la star italienne Asia Argento, l'actrice Lucia Evans et une autre femme restée anonyme.

Jeudi, l'actrice Rose McGowan, mentionné par le New York Times dans l'article qui a mis le feu aux poudres, a affirmé qu'elle aussi avait été violée par le producteur.

À New York, il n'existe pas de prescription pour les accusations de viol. En Californie, une loi prévoyant une prescription de 10 ans a été amendée l'an dernier, sans effet rétroactif.

Selon le quotidien new-yorkais Daily News, la police new-yorkaise cherche à recueillir des éléments concernant des accusations de l'actrice Lucia Evans, qui assure que Harvey Weinstein l'a forcée à lui faire une fellation en 2004.

AP

Asia Argento accuse Harvey Weinstein de viol.

Pas de plainte, pour l'instant 

Mais «aucune plainte n'a pour l'instant été enregistrée et, comme toujours, la police de New York encourage toute personne détentrice d'éventuelles informations à le faire savoir», a indiqué J. Peter Donald, porte-parole du New York Police Department.

L'affaire Harvey Weinstein évoque à divers titres le scandale Bill Cosby : nombreuses victimes présumées, faits survenus sur plusieurs décennies, accusations étouffées par des négociations secrètes, modes opératoires différents mais répétés à outrance par le producteur et le comédien.

Tout comme Cosby, Weinstein affirme que les relations sexuelles publiquement révélées étaient consenties.

La bataille judiciaire qui se profile se déroulera autant au civil qu'au pénal, et les proches du producteur risquent d'être eux-mêmes emportés par le grand déballage.

Selon le Hollywood Reporter, Harvey Weinstein a étoffé son équipe d'avocats. Il s'est attaché les services d'une ténor du barreau de Los Angeles, Blair Berk. Cette diplômée d'Harvard a défendu des stars d'Hollywood comme Mel Gibson et Lindsay Lohan.

La question du «Qui savait et n'a rien dit?» est d'ores-et-déjà posée. Le New York Times assure que depuis 2015 les responsables de la maison de production Weinstein étaient au courant des très embarrassants accords de confidentialité liant leur patron et plusieurs femmes.

Or plusieurs membres du conseil d'administration, dont le frère d'Harvey et cofondateur de la société, Bob Weinstein, ont fait part de leur «surprise totale» à l'éclatement du scandale.

Les faits rapportés par les accusatrices de Weinstein suggèrent d'autre part une possible complicité de collaborateurs ou collaboratrices du magnat d'Hollywood, qui ont accompagné les futures victimes présumées dans la chambre d'hôtel du producteur, avant de se retirer et les laisser en tête-à-tête.

L'Académie des Oscars a prévu une réunion d'urgence samedi pour discuter du cas du producteur.

REUTERS

Harvey Weinstein s'est attaché les services d'une ténor du barreau de Los Angeles, Blair Berk. Sur la photo, elle défend   le chanteur Cee Lo Green, accusé d'avoir drogué une femme en 2012.