Mais non, l'actualité n'est pas un feu roulant. C'est un feu d'artifice. On regarde le spectacle, mais on a déjà oublié ce qui nous pétait devant les yeux il y a 30 ou même 15 secondes. Tenez: où sont les mineurs chiliens?

Hé, hé, je vous prends les culottes baissées, là, hein?

Sont-ils allés à Disney?

Sont-ils heureux?

Sont-ils déjà irrités d'entendre leurs femmes commenter les derniers revirements d'Occupation double?

On ne sait pas. L'actualité les a oubliés.

L'actualité nous montre d'autres feux d'artifice. La grève en France, Obama qui va se faire planter aux législatives... Rien d'aussi poignant que ces mineurs commandités par Oakley, bien sûr. Mais l'actualité est un monstre qu'on nourrit parfois au filet mignon, souvent à la saucisse à hot-dog. Mais il faut le nourrir. Toujours. Sans arrêt.

En cela, le Québec ne fait pas exception. Notre actualité est elle aussi un feu d'artifice. Un BOUM n'attend pas l'autre. Tenez, prenez la loi 115. La semaine dernière, cette loi passée pour faire plaisir à la Cour suprême, qui a avalisé une faille dans la loi 101, retenait toute notre attention.

Aujourd'hui, où est la loi 115, je vous le demande?

À Disney, avec les mineurs chiliens? On ne sait pas.

Car cette semaine, l'actualité a trouvé d'autres saucisses à hot-dog à se mettre sous la dent, avec le 15e anniversaire du référendum, avec les cyclistes de la 112 qui sont morts sans qu'on sache pourquoi, avec le CH qui nous a préparé un début de saison qui fait BOUM...

Mais la loi 115, elle? Où est-elle?

Disparue, la loi 115. Le monstre est passé à un autre appel, à un autre BOUM, aux prénoms des jumeaux de Céline (Eddy et Nelson).

En chroniqueur professionnel et consciencieux, je sais que je devrais parler d'un BOUM récent, comme Joël Legendre qui a vu le JdeM révéler son orientation sexuelle à son corps défendant. Mais j'aimerais parler de la loi 115.

Sur la loi elle-même, pas grand-chose à ajouter qui n'ait été dit. Sur l'anglais, par contre, j'ai un truc à dire. Parce que, dans les 24 heures pendant lesquelles la loi 115 a occupé l'actualité avant d'être digérée par le monstre et de disparaître, il s'est dit beaucoup de niaiseries sur l'apprentissage de l'anglais comme langue seconde.

Beaucoup de gens ont vu la loi 115 comme une bonne chose puisque nos-enfants-doivent-apprendre-l'anglais-et-que-les-écoles-n'enseignent-pas-assez l'anglais. Évidemment, la loi 115 va se charger d'enseigner l'anglais à une poignée de privilégiés qui ont 25 000$ pour envoyer leur kid pendant trois ans à l'école privée anglaise non subventionnée. Elle ne fait rien pour les rejetons des gens de Limoilou qui aiment la NFL mais qui ne comprennent rien à la langue de Monday Night Football...

Donc, à entendre bien des gens se plaindre que l'État québécois ne fait rien pour améliorer l'anglais de leurs enfants, j'ai été fasciné de voir l'anglais décrit comme une sorte de langue extrêmement difficile à apprendre, un dialecte africain à l'alphabet opaque et aux règles obscures...

J'ai des nouvelles pour vous, les amis. C'est pas vrai. Not true.

L'anglais, c'est comme le virus de la grippe dans une garderie par un matin de janvier. Ça s'attrape facilement. Suffit de s'y frotter suffisamment la langue, je dirais, et on l'attrape. Comme ça. Même alphabet. Rien à voir avec le cyrillique russe ou les idéogrammes traditionnels chinois.

Bien sûr, un cours d'anglais langue seconde au secondaire ne fait pas de mal. Mais apprendre l'anglais avec 29 autres petits Tremblay qui parlent français quand le prof a le dos tourné, ça ne permet pas de regarder Mad Men sans les sous-titres. On connaît tous quelqu'un qui avait 90% dans ses cours d'anglais au secondaire mais qui n'était pas capable de demander le chemin vers le Holiday Inn une fois lâché lousse à Niagara Falls, n'est-ce pas?

Il n'y a pas 1000 solutions pour attraper l'anglais. Il n'y en a qu'une: l'immersion.

Vous voulez que votre enfant parle anglais un jour? Inscrivez-le dans un camp de jour anglais. Envoyez-le au camp de hockey à Ottawa, pas à Alma. Vous voulez, jeunes gens, apprendre l'anglais? Achetez un billet d'avion. Allez travailler dans un hôtel à Banff. Allez étudier à Toronto, Ottawa, Halifax.

Trois mois. Quatre, max. C'est le temps qu'il faut pour attraper l'anglais.

Personnellement, j'ai de la chance: les Anglais du bord maternel de ma famille m'ont exposé, jeune, à la langue. Mais à 19 ans, je le baragouinais encore, je n'aurais pas été capable de trouver mon chemin seul à Niagara Falls.

À l'Université d'Ottawa, en trois mois, je suis devenu bilingue. Coloc anglais, cuites en anglais, chicanes en anglais, amourettes en anglais, cours en anglais. Simple de même.

L'anglais, c'est, avant tout, une responsabilité familiale et individuelle. Je ne vois pas ce que l'État a à voir dans la transmission de ce virus fort utile. C'est d'autant plus consternant que ce sont souvent les tenants du «moins d'État» qui veulent que l'État enseigne l'anglais à leurs enfants. Bon, ils n'en sont pas à une contradiction près, remarquez, ce sont les mêmes qui veulent que l'État construise un Colisée pour un club de la LNH...

Pendant que j'y pense, je ne voudrais pas embêter Mme Marois, elle en a plein les bottes avec les pelures de banane de Jacques Parizeau, mais avez-vous remarqué que l'anglais de Gilles Duceppe est à peu près 10 fois meilleur que le sien?

Ottawa a cet effet-là sur les gens.

Peut-être que Mme Marois devrait devenir chef du Bloc.