Retiré de la vie politique et publique depuis un an, Barack Obama est le premier invité du talk-show éphémère (six émissions) My Next Guest Needs No Introduction de David Letterman sur Netflix. L'entrevue de près d'une heure s'amorce lentement (les deux «retraités» semblent un peu rouillés), mais finit par piquer l'intérêt. On en ressort avec l'impression d'avoir vécu une expérience étrange et anachronique, comme si l'élite libérale américaine sortait d'un traumatisme post-Trump et se réveillait gonflée d'espoir face au pays et à l'avenir! L'occupant de la Maison-Blanche n'y est toutefois pas nommé. Résumé en six moments forts.

Au sujet des fake news et des médias sociaux

Après avoir rappelé avec fierté le rôle décisif que les médias sociaux ont joué dans ses deux campagnes électorales, Obama lance une mise en garde contre la manipulation et les dérives de ceux-ci. À ses yeux, leur utilisation peut jouer le jeu de la propagande et du prêt-à-penser, au détriment des faits et de la vérité, car chacun vit «dans sa bulle numérique». «Les Américains qui regardent Fox News habitent une tout autre planète que ceux qui s'informent sur NPR», fait-il remarquer.

Tout sur sa mère

David Letterman revient sur la biographie de l'ex-président (Les rêves de mon père) en soulignant que, malgré son titre, l'auteur y rend surtout hommage à sa mère, une «guide» qui lui a très tôt transmis des valeurs essentielles. «Ma mère est née au Kansas et elle avait les valeurs simples des gens du Midwest: l'honnêteté, la gentillesse, le respect d'autrui, le sens des responsabilités et l'importance de l'éducation dans la jeunesse.» Obama s'en inspire encore aujourd'hui.

La marche qui a tout changé

Au milieu de l'entrevue, on nous montre un reportage que Letterman a fait à Selma. Avec le représentant démocrate afro-américain John Lewis, l'animateur traverse le pont Edmund Pettus - là où, en 1965, Lewis et 600 militants des droits civils ont protesté contre la discrimination raciale pour voter en Alabama. Avant même la traversée du pont, les forces policières avaient chargé le groupe et blessé une soixantaine de manifestants. «Sans lui [John Lewis], je n'aurais jamais été président des États-Unis, affirme Obama. Ce pont est plus qu'un symbole: il nous montre que dans la vie, il faut se battre contre l'injustice et ne pas avoir peur de rêver d'un monde meilleur.»

L'arroseur arrosé

Alors que David Letterman évoque les relations parents-adolescents et le fossé entre sa génération et les milléniaux, il évoque son fils qui utilise «ces appareils» ou «ce type d'appareils»...

«Ça s'appelle un téléphone intelligent [smartphone]», l'interrompt Obama.

Un «mauvais» danseur... selon sa fille

Barack Obama commente une photo de lui en train de danser avec sa fille Sasha devant Prince, qui s'est produit à la Maison-Blanche quatre mois avant sa mort. «C'est Sasha qui m'a pris par la main pour que je danse avec elle devant Prince. J'étais surpris par sa demande, car elle trouve que je suis un mauvais danseur. Elle dit que je fais des mouvements de papa [dad moves].» Le père avoue aussi qu'il a pleuré en aidant sa fille à déménager dans sa résidence étudiante à Harvard.

Le mot de la fin

Obama conclut son heure d'entrevue sur une note assez optimiste. «Contre toute attente, l'Amérique se porte bien», estime-t-il. «C'est loin d'être parfait, mais, si on prend du recul, on réalise qu'avec le temps, la société s'améliore. Avec ma fondation, je veux donner envie aux jeunes leaders de demain de travailler pour changer les choses et briser le statu quo.»

Voilà probablement la seule allusion, à peine voilée, à Donald Trump.

Le prochain invité de David Letterman à My Next Guest Needs No Introduction sera George Clooney.