Tout l'univers d'Au secours de Béatrice se déploie à partir d'un cabinet de psychologue, dans les conversations entre Béatrice (Sophie Lorain) et Monsieur P. (Gabriel Arcand). Pour son auteure, Francine Tougas, écrire la fiction d'une thérapie est «la quintessence de l'écriture». Et ses téléspectateurs en redemandent.

Dans ce marathon qu'est l'écriture d'une série, Francine Tougas se réserve parfois le meilleur pour la fin. «Les scènes avec Monsieur P. me prennent vraiment beaucoup de temps à écrire, dit-elle. Il y a autant de répliques qui vont à la poubelle que de répliques qui restent. Ça macère longtemps. Des fois, tous mes épisodes sont écrits sauf les dialogues avec Monsieur P.»

Au secours de Béatrice, qui raconte la vie d'une urgentologue un peu névrosée suivant une thérapie, a d'abord été un roman, Les mardis de Béatrice, avant de devenir une série. Il y a une dizaine d'années, Francine Tougas a fait lire son livre à sa propre psy pour avoir son avis. «Elle avait beaucoup aimé et trouvé que c'était juste. Elle reconnaissait certaines de mes attitudes. Beaucoup de psys m'ont écrit par la suite pour me féliciter.»

Deux passions

Pour Francine Tougas, Au secours de Béatrice réunit deux de ses passions: la psychologie et la médecine. Lectrice de Freud, Dolto et Jung, elle avait toujours rêvé d'écrire aussi quelque chose qui se passerait dans le milieu médical. Une urgentologue dans un cabinet de psy et voilà, le tour est joué.

«On n'a pas accès en fiction à ce que les personnages pensent, note-t-elle. Nous avons leurs gestes, ce qu'ils disent, mais avec un personnage de psy, on peut savoir ce qui se passe en dedans. C'est très subtil pour un scénariste, parce que le psy devient une espèce de passeur entre les personnages et le spectateur. C'est comme si on pouvait aller plus loin. Parce que le psy, son rôle, c'est de faire sortir les émotions et les pensées de son patient. Écrire ça, pour moi, c'est du bonbon.»

Mais Monsieur P. n'est certes pas le seul psychologue du petit écran. Que pense Francine Tougas de cet engouement pour ce personnage du psy?

«Il y a 10 ans, ce n'était pas du tout comme ça, c'était plutôt rare, dans les séries, d'être en thérapie, de consulter. C'est devenu, même dans la vie, plus courant. C'est de plus en plus considéré comme un moyen de mieux être, au même titre que la massothérapie... C'est beaucoup moins marginal et beaucoup moins associé aujourd'hui à la maladie mentale. On n'a pas à attendre d'être au bout d'une corde pour consulter.»

Une dépression

Francine Tougas ne s'en cache pas, elle consulte elle-même, à l'occasion, sa psy. Une consultation à mi-chemin entre «le luxe et l'entretien», dit l'auteure en riant, qui a souffert dans le passé de crises d'angoisse et d'une dépression.

«Quand j'ai fait ma dépression, je n'étais plus capable de fonctionner, confie-t-elle. Les gens ne font pas la différence entre être déprimé et la dépression, malheureusement. Je prends des antidépresseurs et ça a changé ma vie. Si je n'avais pas ça, il n'y aurait pas d'Au secours de Béatrice! [rires]»

En écrivant sa série, elle craignait que les scènes dans le cabinet du psy soient plus ou moins bien reçues, surtout quand, en plein développement, la série In Treatment (En thérapie dans la version québécoise) est sortie.

«Notre grosse surprise, vraiment, c'est de voir à quel point les téléspectateurs s'identifient au processus. Les longues scènes de thérapie, ils adorent, c'est ce que les gens attendent le plus dans la série. Ce qui est particulier, c'est qu'on suit toutes les étapes de sa thérapie. Et ça porte ses fruits. Les gens évoluent avec Béatrice, je pense. Ma grande réussite, c'est tout ce que les gens me disent. Parfois, c'est adressé à Sophie Lorain, mais ce qu'ils disent, c'est que ça les aide vraiment.»

Les psys de nos séries

Philippe Jacob (François Papineau) dans En thérapie

Monsieur P. (Gabriel Arcand) dans Au secours de Béatrice

Steven Picard (Luc Guérin) dans Unité 9

Doris Bélanger (Isabelle Vincent) dans Nouvelle adresse

Thiéry Côté (Frédérick Bouffard) dans Nouvelle adresse

Marie-Claude Dubé (Nathalie Coupal) dans O'

Maxime Sigouin (Manon Lussier) dans Yamaska

Thérèse Rioux (Pauline Martin) dans Mémoires vives

André Hamelin (Patrice Robitaille) dans 30 vies

Antoine Légaré (Gilbert Sicotte) dans Trauma

Le psychologue (Alexis Martin) dans Les beaux malaises