Pour comprendre le charme et le magnétisme de David Thibault, 17 ans, il faut le voir sur scène. Regard enjôleur, attitude sereine et charmeuse.

Sous les projecteurs, l'adolescent a la sérénité tranquille des habitués de la scène et la fraîcheur des talents qui ne demandent qu'à éclore.

Cet alliage précieux lui a permis de se hisser jusqu'à la finale du populaire concours télévisé The Voice (le pendant français de La voix), déclassant au passage une rivale de taille dans son équipe, la chanteuse libanaise Hiba Tawaji, qui faisait figure de favorite.

Sorti de scène, David Thibault est un jeune homme plutôt timide. Un autodidacte qui a appris à jouer de la guitare et à danser en regardant des vidéos d'Elvis. «David a toujours été un introverti, mais il est capable sur scène de s'exprimer», observe Robert Lavoie, son directeur musical et ami.

Talent

En effet, l'assurance sur scène est, chez David Thibault, un talent inné.

Ainsi, lors de son dernier «live», comme on dit à The Voice, samedi dernier, l'adolescent a mangé une partie des paroles de Crazy in Love de Beyoncé. Sans se démonter ni quitter la caméra des yeux, il s'est raccroché à la chanson, imperturbable.

«C'est naturel», explique, sans s'étonner, David Thibault quand nous le rencontrons quelques jours plus tard à Paris chez son styliste, dans le deuxième arrondissement.

Originaire de Saint-Raymond-de-Portneuf, l'adolescent baigne dans la musique depuis toujours. Son père, batteur amateur, l'asseyait sur ses genoux, derrière la caisse claire, quand il était enfant. Sa mère, qui chantait volontiers dans les fêtes de famille, est aussi amatrice de musique des années 60. Il a hérité, croit-il, du sens du rythme de l'un et de la voix de l'autre.

Mais David Thibault se découvre un talent pour la scène seul. Il a 12 ans, est au «lycée», nous dit-il à la façon des Français, quand une amie l'inscrit au spectacle de Noël. Il monte sur scène pour interpréter Blue Christmas d'Elvis, dont il est déjà un fan. C'est la révélation.

The Voice

Quelques années plus tard, après un passage chez Ellen DeGeneres et sur les scènes du Québec, il se produit devant un public de 1400 personnes et de 6 millions de téléspectateurs qui l'applaudissent chaque samedi soir à The Voice.

David Thibault était pourtant arrivé à la populaire émission sans attente.

Chaque semaine, le candidat a survécu aux éliminations et a été choisi par ses coachs (d'abord Florent Pagny, puis le chanteur pop Mika) ou le public, ce qui l'a mené jusqu'en finale, en plus de lui ouvrir les portes de la tournée française de The Voice.

«Je suis devenu de plus en plus confiant [au fil des émissions], mais, en même temps, j'avais peur que ça s'arrête», explique-t-il.

Travail

David Thibault a posé ses valises en France en mars dernier, dans un hôtel situé tout près des plateaux de tournage de la Plaine Saint-Denis. Robert Lavoie et sa mère, Guylaine Jobin, l'accompagnent.

Il est suivi de près par son imprésario français, Fabrice Marchal, recruté par son imprésario québécois, Martin Leclerc. Cet entourage illustre le statut un peu à part du candidat de The Voice, qui a négocié le droit de s'habiller chez son propre styliste et de gérer la presse québécoise. (Une petite prouesse qu'il faut saluer, l'émission comme les candidats étant inaccessibles à ceux qui ne gravitent pas dans le giron de TF1.)

Tout naturellement, à 17 ans, David Thibault a un emploi du temps qui laisse peu de place à l'improvisation.

Il occupe ses journées à travailler ses chansons avec son coach et l'équipe de The Voice. Et quand la production lui rend sa liberté, il travaille de son côté avec Robert Lavoie.

Émancipation

David Thibault a adopté la France, tout comme les Français l'ont adopté.

D'abord surnommé dans les médias le «Elvis québécois», l'adolescent révèle, depuis ses apparitions sur le plateau de The Voice, une personnalité qui ne demande qu'à s'affirmer hors de l'ombre du King.

Signe qui ne trompe pas, on lui trouve maintenant des ressemblances avec Johnny Hallyday - il faut reconnaître que le regard intense du jeune David Thibault peut rappeler le regard de lynx du monument du rock.

«Je l'ai découvert il n'y a pas longtemps. J'ai lu sa biographie, j'ai écouté ses chansons, dit David Thibault. J'aime beaucoup celles de ses débuts, Kili Watch, Retiens la nuit. J'aime sa présence sur scène. C'est une personne qui a su rester forte dans sa vie.»

Que ce soit Johnny Hallyday, Elvis Presley ou même Céline Dion, David Thibault se compare aux plus grands. Et pourquoi pas? Les portes pourraient bien s'ouvrir devant celui qui commence à composer ses propres chansons - en français - , tout en rêvant d'une carrière internationale.

«C'est un rêve. J'ai déjà fait la France, le Québec, les États-Unis...», dit-il.

Vite

Pour David Thibault, les choses devraient continuer à aller très vite.

Un album sortira «très rapidement», selon Fabrice Marchal.

«Parfois, je ne réalise pas trop ce qui arrive. Je ne prends pas trop le temps de me dire: «Wow! je suis rendu là"», estime pour sa part David Thibault.

Le jeune Québécois continue de mener une vie atypique, mais épanouie, près des adultes qui l'entourent.

«Je communique plus avec des adultes. Robert, c'est mon directeur musical, mais, malgré notre différence d'âge, c'est comme si on était des amis. J'ai besoin de gens comme ça pour m'évader. Je ne sors pas beaucoup, je n'ai pas de groupe d'amis. Je suis finalement assez solitaire.»

Il y a une personne avec qui il partage beaucoup: sa mère, Guylaine Jobin, qui a pris une année sabbatique pour l'accompagner dans son parcours français.

«Tout est nouveau pour nous. Le partager avec ma mère, ça compte beaucoup pour moi. C'était un rêve pour elle de faire carrière. Mais elle n'a jamais eu l'occasion de se lancer plus qu'il ne le faut là-dedans. Elle vit son rêve à travers moi.»

Regarder l'émission et voter pour David Thibault, c'est possible, d'après son équipe. L'émission commence à 20h50, heure française (14h50, heure de Montréal), samedi soir. www.streaming-hub.com/tf1-live/

David Thibault par David Thibault

Comment David Thibault juge-t-il ses propres performances ? Nous lui avons demandé de revenir sur ses prestations dans The Voice.

1 - WAKE ME UP D'AVICII (The Voice le 4 avril)

«C'était ma première fois en direct. C'était très excitant. C'est ce que j'aime: il y a plus de gens sur le plateau [NDLR: que lors du tournage des émissions diffusées en différé]. Ça s'est super bien passé. C'était la première fois que je faisais une chanson récente. J'étais très satisfait du résultat.»

2 - CLOSE TO ME DE THE CURE (The Voice le 11 avril)

«Le public a choisi cette chanson. La première fois que je l'ai écoutée, je n'ai pas trop aimé comment le chanteur chante. Mais j'ai réussi à trouver comment la chanter. Je m'inspire de chanteurs comme James Brown, Ray Charles. J'ai souvent dit que je n'étais pas né à la bonne époque. J'aime beaucoup la musique de cette époque. Les instruments sont plus purs et naturels. Les chanteurs sont de vrais chanteurs.»

3 - CRAZY IN LOVE DE BEYONCÉ (The Voice le 18 avril)

«C'était plus particulier. Les paroles allaient vite. Je l'aurais peut-être mieux eue si j'avais eu plus de temps, mais on a juste une semaine pour se préparer. C'est une de mes pires performances.»

4 - The Voice, samedi soir

Les chansons que David Thibault va interpréter ce soir sont gardées ultrasecrètes. On saura seulement que c'est Mika qui les a choisies. «C'est une surprise, dit-il. J'ai beaucoup de travail à faire. Je veux prendre du temps pour bien travailler mes chansons, en apprendre les paroles.»

La «magie» David Thibault vue par Mika

Depuis que David Thibault est passé dans l'équipe de Mika, le coach louange chacune de ses interprétations sur scène.

Hors plateau, il parle toujours avec enthousiasme du jeune Québécois, capable de se glisser dans des univers pop sans se renier.

« David a cette combinaison spéciale, magique même : il est très moderne et a en même temps un sens très distinctif. Il a un côté pop et fun, et sérieux en même temps. Il est intense, vintage, touchant », décrit Mika.

Auteur de succès internationaux comme Relax ou Grace Kelly qui ont fait sa réputation dans tous les clubs du monde au milieu des années 2000, Mika a lui-même un côté pop, dansant et volontiers flamboyant. Aussi semble-t-il préférer quand David Thibault s'éloigne du King.

« Elvis, bon, c'est charmant. Mais il y a déjà eu un Elvis, et on n'est plus dans les années 60 », dit le chanteur, plus impressionné par la reprise de Close to Me de The Cure par David Thibault.

Pour son programme vocal, ce soir, Mika a encouragé son « talent », comme on appelle les candidats de The Voice, à aller vers quelque chose de populaire, mais d'inusité pour lui. « Je ne voulais pas d'Elvis ni de David Guetta », dit-il, avant de nous détailler le menu de performance de ce soir (que l'on doit, discrétion oblige, taire ici). Mais ce programme pourrait assurément causer la surprise. « C'est la classe », croit Mika.

Si le Québécois a suscité la surprise au cours de cette édition de The Voice, peut-il gagner ? Mika reste prudent côté pronostic. « Personne ne sait qui va gagner. Tout le monde a une chance : il n'y a aucune évidence », estime-t-il.

Coach pour la deuxième fois à The Voice, Mika a mené l'an dernier Kendji jusqu'à la victoire. Son ancien poulain est le seul artiste sorti de The Voice, tous pays confondus, à avoir vendu plus de 1 million d'albums. Mais cette semaine, les médias français y allaient de leurs suppositions quant au retour de Mika pour une troisième année.

« On n'a pas commencé à discuter », dit Mika, qui sortira un album prochainement et reprendra la route des tournées. « Je suis toujours en train de voyager. Je me régale, je m'amuse. J'ai 31 ans et c'est le moment de faire ça », dit-il.

PHOTO LOIC VENANCE, ARCHIVES AFP

Le chanteur Mika