Ceux qui regardaient Fanfreluche rêvaient de sauter dans son grand livre de contes. Par la magie de l'écran vert, Sophie Cadieux a eu ce luxe, se promenant de case en case dans les albums de certains de nos bédéistes les plus talentueux.

Plus qu'un artifice, le procédé contribue grandement à l'intérêt de BD QC, nouvelle série vraiment réjouissante que diffuse ICI ARTV dès dimanche à 19 h pour 10 semaines.

Je ne connais strictement rien à la bande dessinée, mais je ne me suis pas ennuyé un seul instant.

Chaque épisode de 30 minutes est consacré à un bédéiste différent, en commençant dimanche par Michel Rabagliati, créateur de Paul, dont les histoires ont franchi les 250 000 exemplaires vendus.

Parcourant les cases de ses albums en noir et blanc, l'auteur nous fait revivre chaque étape de création, avec tout ce que cela comporte d'excitation et d'angoisse. C'est vivant, animé, pas du tout statique.

Les voitures de ses maquettes se mettent à rouler, on entend la nature. Sophie Cadieux se permet même de lire certains passages avec l'auteur sans que ce soit laborieux.

Réussite du réalisateur Denis Blaquière, qui a eu l'idée de cette série avec Carmen Giroux, et de son fils Louis-Vincent.

Il faut dire que Michel Rabagliati est un être extrêmement attachant. On a affaire à un communicateur dont on boit les paroles, loin du créateur sombre et solitaire. On rit et on est ému l'instant suivant quand il raconte avoir enregistré les propos de son beau-père mourant et dessiné ses derniers instants dans Paul à Québec avec des mouchoirs à portée de main. Il n'a jamais pu réécouter l'enregistrement.

Le cas de Zviane, qui fait l'objet du cinquième épisode, a de quoi fasciner. Cette pianiste a créé L'ostie d'chat à quatre mains avec sa complice Iris, avant d'enchaîner avec Apnée, inspirée de sa dépression.

Les deuxièmes, son huis clos amoureux, propose des scènes extrêmement explicites. Encore là, une auteure dont l'énergie créatrice fait du bien à voir.

Une bédé qui s'exporte

Mais qu'en est-il de l'état de la bande dessinée au Québec? Jean-Paul Eid, créateur du personnage de Jérôme Bigras, affirme que la bédé d'ici traverse une période faste, avec le rayonnement à l'international de noms illustres comme Delaf et Dubuc, qui font l'objet du deuxième épisode avec leurs Nombrils, mais aussi l'arrivée de jeunes auteurs brillants. Michel Rabagliati ajoute que l'internet a énormément facilité le travail des bédéistes, qui peuvent plus facilement acheminer leurs maquettes aux éditeurs, où qu'ils soient dans le monde.

Comme bien d'autres, Sophie Cadieux a découvert la bédé avec Mafalda, Tintin et Astérix, mais elle s'est plus sérieusement intéressée au genre au début de la vingtaine. Elle souhaite que la série donne le goût aux gens de courir acheter les albums dans les librairies, ou, à tout le moins, qu'elle suscite leur curiosité.

Les autres épisodes de BD QC portent sur Guy Delisle, Jimmy Beaulieu, Julie Rocheleau, le duo Godbout-Fournier et son fameux Red Ketchup du magazine Croc, Leif Tande et Thierry Labrosse.

Si vous passez par la Place des Arts, faites un arrêt à l'ARTV studio pour explorer les univers des 10 créateurs.