Les relations de Québecor avec Astral sont rendues tellement mauvaises qu'il est dorénavant «impossible» pour TVA, propriété de Québecor, d'utiliser à l'écran les services de personnalités associés aux stations de radio d'Astral, affirme un cadre de l'information de la chaîne télévisée.

Michel Gagnon, directeur à l'information de TVA Sherbrooke, a expliqué la nouvelle donne après avoir remercié de ses services une présentatrice météo occasionnelle de la chaîne, qui avait le malheur d'être aussi une populaire animatrice radio de la chaîne Rouge FM, propriété d'Astral, en Estrie.

Dans un message envoyé la semaine dernière et que La Presse a obtenu, M. Gagnon explique à l'animatrice Valérie Sirois qu'il doit mettre fin à son emploi même si elle faisait un excellent travail.

«Le monde t'aimait beaucoup et tu faisais très bien la job. Toutefois, le conflit Astral-Bell versus Québecor a tellement dégradé que d'avoir des personnalités d'Astral en ondes est devenu impossible. Donc, tu es simplement victime de cette confrontation», écrit-il.

Dans la même missive, il remet en question l'utilisation de deux autres employés contractuels qui sont dans la même situation, mais qui, au lieu de présenter la météo, font des voix hors champ.

«Cette association avec les deux voix des canaux spécialisés est aussi très questionnable à ce moment-ci», dit-il.

Joint au téléphone hier, Michel Gagnon a martelé à plus d'une reprise qu'il ne fait qu'exécuter les directives venues de la hiérarchie de TVA, à Montréal.

Pur mensonge, selon la porte-parole de TVA, Véronique Mercier.

Informée de la situation par La Presse hier soir, elle a nié toute politique d'exclusion envers les surnuméraires qui travailleraient chez Astral. «Il s'agit d'un cas isolé et la direction de TVA n'approuve pas les raisons évoquées par le gestionnaire mis en cause. Le gestionnaire sera rencontré à ce sujet», dit-elle.

«On est rendus là!»

Rappelons que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) n'a pas encore annoncé s'il approuverait ou non l'acquisition d'Astral par Bell, concurrent de Québecor. Le président de Québecor, Pierre Karl Péladeau, s'est vigoureusement opposé à la transaction.

Michel Gagnon reconnaît qu'Astral n'est pas encore un compétiteur direct de TVA, mais dit constater qu'elle est en voie de le devenir, si la transaction est acceptée. «Ils sont en chemin!», insiste-t-il.

Il explique que Valérie Sirois et d'autres employés à temps partiel de TVA travaillaient depuis longtemps en parallèle chez des chaînes d'Astral, afin de boucler leurs fins de mois, et que cela n'avait jamais posé problème auparavant.

«Ça fait longtemps qu'elle travaillait pour moi. Je n'ai jamais réagi», dit-il.

«Avec les gens de la radio, on n'était pas là, avant. Il n'y avait pas cette pression sur nous qui est maintenant beaucoup plus corporative», explique M. Gagnon.

«On est rendus là», ajoute-t-il.

«La situation change, quand on regarde tout ce qui s'est passé au CRTC», dit-il, avant d'ajouter que «quand on a du personnel qui vient d'Astral en ondes, c'est sûr que ça fait jaser».

Selon Christian Brunelle, professeur titulaire à la faculté de droit de l'Université Laval, le congédiement d'une employée pour ses liens avec Astral, avant même que le CRTC n'annonce sa décision sur la fusion avec Bell, pourrait probablement être contesté en cour.

«À première vue, il peut y avoir un problème. Ça me paraît difficile à justifier. Il faut savoir que les tribunaux vont regarder les faits au moment du congédiement. Les faits postérieurs [NDLR: comme la fusion éventuelle] ne sont pas pertinents», dit-il.

Il souligne que les codes du travail canadien et québécois offrent des recours aux employés qui, après avoir travaillé suffisamment longtemps et de façon continue pour un employeur, jugent leur congédiement injustifié.

L'animatrice Valérie Sirois a refusé de commenter la situation.