Qu'elle soit créée ou non pour le web, la télé québécoise ne fait pas fi des frontières. Le terrain de jeu des scénaristes d'ici se limite généralement à la province, sinon aux environs de Montréal. Avec Neuroblaste, ces limites n'existent plus. La nouvelle webtélé de Radio-Canada aborde un genre peu exploité ici, la science-fiction, dans la forme d'un thriller scientifique aux ramifications internationales: Montréal, Dubaï, Buenos Aires et New York. Des destinations accessibles en... quelques coups de crayon.

Neuroblaste, série réalisée par François Bégin à partir d'un scénario principalement développé par le dramaturge Pierre-Michel Tremblay, a été conçue en motion comic (ou BD vidéo), un médium qui tient à la fois de la bande dessinée et du dessin animé. «Avec ce médium-là, on fait éclater les limites qu'on a habituellement. On peut vraiment raconter les histoires qu'on veut, à peu de frais, fait valoir François Bégin. La seule limite qui compte, c'est celle de l'imagination.»

La série raconte les mésaventures de Félix, Aube et Neil, un trio de scientifiques qui, en cherchant un vaccin contre la maladie d'Alzheimer, découvre un sérum capable de contrôler le cerveau humain. Une fois ébruitée, leur découverte suscite l'intérêt d'une puissante organisation occulte déterminée à s'assurer leur collaboration coûte que coûte. Ce qui n'est pas une bonne nouvelle pour les jeunes Montréalais...

Neuroblaste, est-il précisé dans le descriptif du projet, s'appuie sur des faits véridiques. Une journaliste scientifique, Marie-Pier Élie (Québec Science, Le code Chastenay) a d'ailleurs été recrutée pour s'assurer que les inventions des scénaristes et les dialogues soient réalistes, ou du moins plausibles. «Pierre-Michel aime que ce qu'il écrit soit du domaine du possible, dit François Bégin. Pris individuellement, chaque morceau est réel. La part de la fiction, c'est de les mettre ensemble.»

Esthétique et coup de crayon

L'esthétique visuelle, elle, dépeint un monde réel, mais avec une technique qui n'a rien de réaliste. La manière dont François Bégin aborde le motion comic a même quelque chose de suranné: ni les personnages ni les décors ne bougent, l'illusion de mouvement étant créée par le montage et les effets de caméra très cinématographiques. Le coup de crayon n'a rien du cartoon. Parlons plutôt d'un mélange entre la bédé européenne et le comic book américain mettant en vedette des superhéros.

«Je voulais qu'on sente l'humain, qu'on sente le coup de crayon, que ce soit un peu trash. Je voulais que la forme se rapproche du propos», dit encore le réalisateur, qui précise que Neuroblaste n'est pas une bande dessinée pour enfant. Le scénario s'avère en effet relativement complexe et compte des scènes pas nécessairement osées, mais tout de même destinées à un auditoire d'une certaine maturité.

Ce n'est pas la première fois que Radio-Canada aborde l'univers du motion comic. Le bédéiste Jean-Paul Eid (Le naufragé de Memoria) a utilisé ce procédé pour Meurtres à la carte, la déclinaison web interactive de Musée Éden. Il s'agit toutefois de la première fois que cette technique est utilisée pour une oeuvre à part entière. L'expérience est porteuse, même si Neuroblaste ne trouve pas toujours le ton juste, sur le plan des voix.

«Roberto Rodriguez a ramené la bédé dans le cinéma, moi j'avais envie de ramener le cinéma dans la bédé», résume François Bégin. Neuroblaste comptera 13 épisodes d'environ 4 minutes, diffusés tous les mardis sur le site de Radio-Canada et sur Tou.tv.