On pourrait croire que le lancement d'une nouvelle chaîne de télévision au Sénégal a reçu l'appui du gouvernement du pays.

Après tout, le premier ministre a assisté au lancement, accompagné de plusieurs ministres et de leurs gardes du corps. Ils se sont tous rendus devant la scène où ils ont accueilli le propriétaire de la chaîne, le chanteur Youssou Ndour.

Pourtant, le gouvernement sénégalais a interdit à Ndour de diffuser des bulletins de nouvelles sur sa chaîne, et la licence lui permettant de présenter une «programmation culturelle» ne lui a été accordée qu'après deux ans d'attente. Une pétition s'opposant au délai avait été signée par deux millions de ses compatriotes, près du cinquième de la population.

À l'extérieur du Sénégal, l'artiste de 50 ans est surtout connu pour sa musique et la voix qui lui a permis de récolter un Grammy et de jouer à guichets fermés au stade Bercy de Paris, qui compte 17 000 places. Dans son propre pays, Ndour est aussi connu pour ses critiques du parti au pouvoir.

Il possède déjà une station de radio qui diffuse régulièrement des débats, de même qu'un journal qui rapporte fréquemment les allégations de corruption auxquelles font face les dirigeants du pays, dont la famille du président sénégalais Abdoulaye Wade.

Le chanteur a investi son propre argent, 3 millions $, pour bâtir le studio de télévision, mais le projet a stagné en 2008 lorsque le gouvernement a refusé d'accepter la demande de licence, accusant Ndour de financer la chaîne avec des dons de donateurs étrangers, ce qui serait illégal au Sénégal.

Selon Ndour, l'impasse a perduré, même s'il a pu prouver que l'argent venait des droits d'auteur qu'il recevait, notamment grâce à son succès de 1994 7 Seconds, un duo avec Neneh Cherry.

Le gouvernement a finalement accepté sa demande, mais sa licence le limite à une programmation culturelle et lui interdit de diffuser des bulletins d'information. Ndour croit cependant que les termes utilisés par le gouvernement lui permettront de contourner le problème, puisque «le mot «culture» peut vouloir dire n'importe quoi».