Les communautés culturelles sont sous-représentées dans les médias québécois, en fiction et en information, conclut un avis du Conseil des relations interculturelles (CRI) rendu public hier.

Les membres de communautés culturelles constitueraient 26% des personnes présentées en heure de grande écoute à Télé-Québec, 11,5% à Radio-Canada, 7% à TVA. Le réseau anglais CTV avance le chiffre de 42%.

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Le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles a demandé au CRI d'examiner la représentation des minorités dans les médias et dans la publicité. Selon le mandat, l'avis devait aider à «améliorer leur représentation». Par voie de communiqué, la ministre Yolande James, a dit recevoir favorablement les résultats de l'avis.

TVA conteste les résultats de l'étude. «La méthodologie est questionnable», a soutenu Nicole Tardif, porte-parole de la chaîne. Seul CTV a chiffré le pourcentage de ses employés issus des communautés ethnoculturelles. Le CRI n'avait pas accès à ces informations pour Radio-Canada, Télé-Québec ou TVA. Il a donc dû faire une «étude exploratoire», explique Luc Tremblay, porte-parole de l'organisme.

Le CRI s'appuyait sur les informations disponibles sur l'internet pour calculer le «taux global de présence à l'écran».

Pour Radio-Canada et Télé-Québec, il s'agit de la proportion des minorités visibles sur l'ensemble des personnes vues à l'écran (entre 19h et 23h, automne-hiver 2008-2009).

Le CRI n'a pas trouvé autant d'informations sur le site tva.canoë.ca. Il a donc choisi d'examiner «la biographie des vedettes TVA de la saison hiver 2009». Sur 128 vedettes, 10 provenaient des minorités.

«Plusieurs gens ne sont pas représentés dans nos fiches biographiques sur l'internet. Le Conseil ne tient donc pas compte par exemple de tous les seconds rôles et de plusieurs autres employés», déplore Mme Tardif.

M. Tremblay concède que «sur le plan scientifique, ce n'était pas la meilleure façon de procéder». Mais il rappelle qu'il n'avait pas le choix, car les diffuseurs n'avaient pas ou ne voulaient pas lui fournir les chiffres. «Le but de l'étude n'était pas de juger les médias, tient-il à préciser. On cherche plutôt à les aider à mieux représenter la diversité.»

Le CRI ne parle pas de Global ou des chaînes spécialisées dans son avis. Rappelons que lors de leur demande de licence ou de renouvellement de licence devant le CRTC, les télédiffuseurs doivent présenter un plan pour améliorer l'image et la représentativité de la diversité culturelle.

L'étude du CRI comportait d'autres volets, dont une analyse de la représentativité des communautés culturelles dans les publicités, une analyse de leur représentation dans les médias écrits et aussi un sondage Léger Marketing, dont La Presse a fait état hier.

Deux grandes tendances se dégagent. La sous-représentation des communautés culturelles. Et à l'intérieur même de ces communautés, la sous-représentation des minorités dites visibles par rapport à l'ensemble des membres, qui incluent entre autres les «Caucasiens».

Les minorités visibles comptent pour 20% des membres des communautés culturelles de première et deuxième génération qui travaillent dans les arts, la culture, le sport et le loisir. Or, les minorités visibles comptent pour 38,7% de la population des communautés culturelles de ces deux générations. Elles sont donc sous-représentées. (Données issues du recensement 2006).

L'écart est particulièrement marqué pour les gens d'origine africaine, antillaise et asiatique. Ils représentent 41% des immigrants, mais seulement 8% des immigrants comédiens et 19% des immigrants techniciens.

Est-ce pire dans les médias que dans les autres secteurs d'emploi? «La situation est similaire dans plusieurs autres secteurs, indique Patricia Rimok, présidente du CRI. Mais les médias sont un miroir de la société. Quand ils n'en reconnaissent pas des pans entiers, il y a un problème. Ils connaissent déjà des problèmes économiques importants. S'ils ne prennent pas ce virage, ce sera difficile pour leur survie même. N'oubliez pas que 30% de la population québécoise est issue des trois dernières générations d'immigration.»

L'avis du CRI s'intéressait aussi à la publicité. L'année dernière, 16,8% des publicités montraient une personne issue d'une communauté culturelle. Dans 68,1% de ces cas, cette personne était figurante. (Échantillon de 1652 pubs sur un total possible de 4602; non pondéré par la fréquence de diffusion). Ce sont les pubs du gouvernement qui accordent le plus de place aux communautés culturelles, avec 22,1%. Les pubs de voiture arrivent en dernier avec 8,4%.

L'avis du CRI offre aussi une analyse qualitative des médias écrits. Parmi les articles sur les communautés culturelles, 48% auraient une «portée négative», 29% une portée positive, et 23% seraient neutres. Le CRI invoque un manque de temps et d'argent pour expliquer son échantillon «restreint» de 600 articles. La marge d'erreur est de 8%. Et il n'y a pas de groupe contrôle pour vérifier le pourcentage d'articles positifs ou négatifs pour le reste de la population.