Minute après minute, les PPM permettent de dresser un portrait précis des habitudes d'écoute. Forts de cette nouvelle méthode de calcul, les radiodiffuseurs espèrent relancer le débat sur les quotas musicaux auxquels les stations francophones doivent se plier. À l'ère des baladeurs numériques, l'arrivée des PPM pourrait-elle se traduire par un recul du français sur les ondes?

Avec de tout nouveaux résultats PPM en main, plusieurs dirigeants de stations radiophoniques musicales souhaitent obtenir un assouplissement des règles concernant les quotas qui les obligent à diffuser 65 % de chansons francophones.

 

L'ère de la méthode BBM, calculée à l'aide de cahiers d'écoute que devaient remplir les auditeurs, est désormais révolue. Les nouveaux résultats PPM, mesurés à l'aide d'un audimètre - un appareil qui permet de détecter de minute en minute le contenu radiophonique auquel l'auditeur est exposé à la maison ou ailleurs - dresse un portrait plus précis des habitudes d'écoute, croient les radiodiffuseurs. Grâce à ces nouvelles données, ils croient disposer d'arguments de taille pour convaincre le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de modifier la réglementation concernant les contenus musicaux.

«Avec les PPM, on est toujours en sondage, souligne Mario Cecchini, vice-président de Corus Québec. Nous allons donc pouvoir mieux comprendre les comportements des auditeurs.» Par exemple, en soirée, les stations francophones diffusent beaucoup de chansons interprétées dans la langue de Molière afin de respecter les quotas imposés par CRTC, souligne le directeur général de Rythme FM, Richard Lachance. Or, si les PPM permettaient de montrer, comme semblent le croire les radiodiffuseurs, qu'à la fin de la journée, les auditeurs francophones syntonisent davantage les chaînes anglophones, les propriétaires de stations cogneront à la porte du CRTC afin qu'il revoie ses règles, poursuit M. Lachance.

Pour le moment, 65 % de la musique qui tourne sur les ondes des stations de radio francophone doit être en langue française. Or, l'Association canadienne des radiodiffuseurs demande que les quotas passent de 65 à 50 %. Les radiodiffuseurs souhaitent en effet offrir une plus grande variété musicale pour séduire les auditeurs tentés d'écouter leur baladeur numérique au détriment de la radio. Ils croient aussi que cette balise empêche l'arrivée sur le marché de nouveaux formats tels que des stations spécialisées dans le blues ou le hip-hop, par exemple.

«On a des règles qui ont été mises en place alors que nous étions dans une autre époque, estime Mario Cecchini, président du conseil d'administration du Bureau de commercialisation de la radio du Québec (BCRQ). Ce qu'on souhaite, c'est que les PPM jettent une nouvelle lumière sur le marché et que ça alimentera le débat avec le CRTC par rapport aux choix auxquels les auditeurs font face.»

Richard Lachance va plus loin en affirmant que si la méthode PPM avait existée il y a quelques années, la station COOL FM - maintenant devenue la radio parlée 98,5 - n'aurait peut-être pas été forcée de mettre la clé sous la porte. À l'époque, l'idée était d'implanter à Montréal une station s'adressant aux amateurs de rock, de hip-hop et de musique émergente âgés entre 25 et 35 ans. Comme les auditeurs n'étaient pas au rendez-vous, COOL FM est disparue des ondes en 2003, après trois ans d'existence.

«Si les propriétaires avaient eu accès à des données PPM, ils auraient peut-être pu prouver au CRTC que la fidélisation de l'auditoire passe, par exemple, par la mise en ondes d'un plus grand nombre de pièce musicales en anglais», croit M. Lachance.

Solange Drouin, directrice générale de l'ADISQ, ne partage pas cet avis. «Selon moi, l'argument des PPM pour faire diminuer les quotas de musique francophone, est loin d'être convaincant», affirme-t-elle. Mme Drouin rappelle que cette nouvelle méthode de calcul ne mesure pas les habitudes d'écoute mais bien le contenu radiophonique auquel les gens sont exposés notamment au restaurant ou au centre commercial. «Les revenus des stations de radio sont en hausse, poursuit-elle. Je comprends mal comment les règles imposées sont préjudiciables.»

Résultats PPM

Par ailleurs, les résultats PPM dévoilés hier confirment la domination de Rythme FM au chapitre des parts de marché ainsi qu'au palmarès des émissions les plus écoutées.

Pour la période allant du 1er septembre au 30 novembre, la station musicale détient 17,4 % des parts de marché, suivie de la Première Chaîne de Radio-Canada (11,6 %). Le 98,5 FM se classe en troisième position avec 11,4 % des parts de marché.

Parmi les 10 émissions les plus écoutées dans la région du grand Montréal, neuf sont diffusées sur les ondes de Rythme FM. Rythme au travail (PM) se classe en tête du palmarès avec en moyenne 74 570 auditeurs. Rythme au travail (AM) occupe la seconde place avec 70 470 auditeurs.

Ces résultats s'apparentent aux premières données PPM dévoilées le 20 novembre. Les prochains résultats PPM seront publiés le 11 mars.