L'orignal sur le balcon. Les caisses de galettes à la mélasse. Le tir à la carabine sur des boîtes de conserve vides. Ces quelques clins d'oeil humoristiques, faisant référence aux régions et présentés dans la comédie Roxy, sont loin de faire l'unanimité auprès des téléspectateurs de l'Abitibi, dont certains ont l'impression d'être ridiculisés.

Présentée sur les ondes de Radio-Canada, l'émission relate les aventures d'une femme de la vingtaine, originaire de Sainte-Julienne-des-Patriotes - village fictif situé à 15 heures de route de la métropole -, qui débarque en ville. Avant le début de la saison, les premières bandes-annonces venaient à peine d'être diffusées qu'elles suscitaient déjà l'inquiétude de l'Association touristique régionale de l'Abitibi-Témiscamingue. On craignait alors de voir Roxy, mettant en vedette Cathy Gauthier, humoriste originaire de l'Abitibi, véhiculer des stéréotypes et des préjugés sur les régions. L'Association a fait une sortie à la télévision régionale. «Lorsqu'on a vu les extraits, il y a eu de l'appréhension. Pour les régions du Québec, ça dépeint une drôle d'image», nous a expliqué un membre de l'Association, qui a demandé à ne pas être identifié puisqu'il ne parlait pas au nom de son organisme.

 

Les épisodes diffusés jusqu'à maintenant ne dérangent pas que l'Association, en Abitibi. «On est souvent perçus comme étant des gens un peu moins cultivés», déplore Aline Nadeau, une journaliste à l'hebdomadaire Le vrai citoyen, de Normétal, rencontrée à une table du Centre des loisirs de Normétal, à la suite d'un dîner de l'équipe de tournage des Fins dernières, un film de Bernard Émond (La neuvaine).

En entendant ces propos, les femmes assises à ses côtés ont toutes acquiescé.

«J'ai vu les bandes-annonces et vraiment ce genre d'émission-là, ça ne m'attire pas: je n'ai jamais eu ça moi un orignal sur mon perron!» lance Gaétanne Boily, tout en s'affairant à laver la vaisselle dans la cuisine du Centre des loisirs. Plusieurs résidants de ce petit village de 902 habitants espèrent d'ailleurs que le prochain long métrage de Bernard Émond permettra de rétablir la réputation de l'Abitibi qui est, selon eux, trop souvent écorchée à la télévision. Pour eux, l'arrivée sur les ondes de Roxy a été la goutte qui a fait déborder le vase.

«L'émission Roxy c'est une chose, mais au-delà de ça, l'image qui est véhiculée est rarement positive, mentionne la présidente de Solidarité rurale du Québec, Claire Bolduc, qui habite en Abitibi depuis 28 ans. Il y a énormément de gens de qualité en Abitibi et ils ne sortent pas tous du bois.» Mme Bolduc avait également dénoncé la situation dans un article publié dans La Terre de chez-nous.

Elle tient tout de même à nuancer ses propos en soulignant qu'elle est consciente qu'il s'agit d'une sitcom et qu'il ne faut pas tout prendre au premier degré. «Les images sont amplifiées, dit-elle. Ça ne reflète pas la réalité.»

Pour sa part, Cathy Gauthier, la vedette de l'émission, se défend bien de ridiculiser qui que ce soit. «L'idée, c'était de parler de ma réalité à moi quand je suis arrivée à Montréal, raconte-t-elle. C'est vrai que ma mère m'envoyait de la bouffe par autobus. C'est sûr que je n'ai jamais reçu un orignal. Ça, c'est exagéré. Il ne faut pas oublier qu'on est à la télévision. On est dans le farfelu.»

Stéphane Lapointe, l'un des réalisateurs de l'émission, en rajoute: «Dans la sitcom, tous les personnages ont leurs bons et leurs mauvais côtés, qu'ils viennent de la ville ou de l'extérieur, tient-il à souligner. Les gens n'ont pas de raison de se sentir vexés. Je ne pense pas qu'on s'acharne.»