C'est un hommage bien senti au théâtre que rendent Serge Denoncourt et sa troupe en présentant Edmond au TNM. Une pièce drôle, pétulante et sans prétention.

Après son remarquable Cyrano de Bergerac - avec Patrice Robitaille - il y a quatre ans sur la même scène, Serge Denoncourt revisite le chef-d'oeuvre d'Edmond Rostand, cette fois, depuis les coulisses. La pièce du Français Alexis Michalik, Edmond, permet au metteur en scène québécois de rendre un hommage réussi à l'art de la scène et à ses artisans.

Cette comédie enlevante s'inspire de la création en 1897 de Cyrano de Bergerac, pièce en vers écrite par le poète Edmond Rostand (François-Xavier Dufour) et jouée par le grand comédien de l'époque Constant Coquelin (Normand Lévesque). Le comédien approchait alors de la fin de sa carrière, tandis que le poète tirait la vache par la queue.

L'aventure s'annonce donc hasardeuse, voire rocambolesque. 

Au diapason, la mise en scène s'emballe avec cette matière qui parle d'inspiration et de création artistique, là où le doute, les remises en question et les fréquents changements de cap sont si... créatifs !

L'envers du décor - ceux de Guillaume Lord sont inventifs comme toujours -, c'est le vrai sujet d'Edmond. Dans cet espace de stress et de bravoure, de sensibilité et d'exacerbation où, hier comme de tout temps au théâtre, les producteurs sont avides, les acteurs grandiloquents et les dramaturges, des esprits tourmentés tapis dans l'ombre.

Edmond rend hommage aux conventions théâtrales, aux archétypes dramatiques et à quelques grands noms indissociables de l'histoire des planches - Sarah Bernhardt, Feydeau, Stanislavski, Tchekhov - et autres grands créateurs du temps - Ravel, Méliès et les frères Lumière. Une époque où la magie sur scène était encore possible avec trois bouts de ficelle, un masque et des trappes bancales au sol.

L'intelligence du texte de Michalik, incluant ses références au style de jeu empesé ou au texte récité plus qu'interprété, permet aussi au metteur en scène québécois amoureux de son art d'y aller de ses propres clins d'oeil envers les créateurs de théâtre d'ici.

Réels ressorts comiques d'une pièce qui joue sur la vivacité d'esprit et la répartie, les comédiens de soutien s'en donnent à coeur joie sous la gouverne de Denoncourt. Les Kim Despatis, Mathieu Quesnel, Jean-Moïse Martin et Catherine Proulx-Lemay mènent le bal de ce côté.

Même si François-Xavier Dufour est convaincant en Edmond, il lui manque encore un peu de lustre. Quant au toujours drôle Normand Lévesque, en Coquelin, il projette mal et sa voix est enterrée par celle de ses collègues durant certaines scènes.

Par ailleurs, le spectacle prend du temps avant de trouver son rythme. Mais c'est une remarque qui est faite à l'égard de tant de spectacles de nos jours au Québec. Manque de temps, d'argent et quoi encore... des « répétitions payées » !

Cette réplique, d'ailleurs, est l'une des plus applaudies de la pièce. Un rire jaune, certes, dans une salle composée majoritairement de gens de théâtre lors de la première médiatique. On a beau aimer le théâtre ici, on ne le finance toujours pas comme il se doit.

Une pièce d'Alexis Michalik

Mise en scène de Serge Denoncourt

Avec François-Xavier Dufour, Normand Lévesque, Mathieu Quesnel, Catherine Proulx Lemay, Émilie Bibeau, Kim Despatis, Jean-Moïse Martin, Mathieu Richard, Widemir Normil, Philippe Thibault-Denis, Marie-Pierre Labrecque et Daniel Parent.

Au TNM jusqu'au 28 août

***1/2

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Extrait de la pièce Edmond, au TNM