Après Mambo Italiano, Ciao Bella et Chroniques de Saint-Léonard, Steve Galluccio lance un autre pavé dans la mare pour secouer la famille italo-québécoise, avec Les secrets de la Petite Italie. Dramatiquement comique.

Décidément, Steve Galluccio en a long à dire (et à écrire) sur les moeurs italiennes. Depuis près de 20 ans, à travers une dizaine de pièces et de scénarios, l'auteur porte un regard à la fois tendre et amusé, critique et satirique, sur la culture méditerranéenne dont il est le fruit.

Un univers familial où l'on a du mal à affirmer sa différence. Un monde tricoté serré et névrosé, où tous les personnages sont caractériels et hypersensibles.

Steve Galluccio y peint la (sa) communauté italo-canadienne à gros traits, avec ses clichés et ses vulgarités. Or, jamais l'auteur ne tombe dans la moquerie, le mépris, la facilité. Probablement parce que Galluccio a un rapport amour-haine avec les siens. Et comme tous les amoureux éconduits, il nous fait rire pour mieux panser ses blessures. 

« On a tous un jardin secret, des squelettes dans le placard, croit-il. On a tous été blessés à un moment donné. On a tous eu peur ou souffert par moments dans sa vie. »

L'ultime tabou

À 57 ans, Steve Galluccio vit pourtant l'une des périodes les plus belles de sa vie. Marié depuis plus d'un an avec un « pur-laine », il récolte les succès au théâtre comme au cinéma et a même des projets à Hollywood.

Le dramaturge dit néanmoins ne pas croire en la ballade des gens heureux, ces gens qui s'estiment au-dessus des épreuves et des échecs. « C'est de la grosse bullshit ! Pour moi, ça sonne comme une personne prise au milieu d'une grosse tempête, d'un ouragan, et qui te dit de voir le côté positif ! »

Si la vie est un tsunami, les humains sont nécessairement brisés, imparfaits, selon Galluccio.

« Je ne crois pas au bonheur. Par contre, je crois à la résilience. À mon avis, les minorités, les immigrants, les LGBT et les artistes sont plus résilients. Pas parce qu'ils sont meilleurs que les autres, simplement parce qu'ils doivent toujours se battre pour s'affirmer. »

- Steve Galluccio

Dans Mambo Italiano, son premier succès au théâtre, il abordait la question par le biais du coming out d'un fils gai à ses parents italiens et catholiques, parce que l'homosexualité est encore taboue chez les Italo-Québécois, comme les mariages mixtes, le concubinage, le divorce... 

Dans sa nouvelle pièce, Les secrets de la Petite Italie, à l'affiche chez Duceppe dès mardi soir, Galluccio met en scène une femme transgenre qui revient voir son père qui l'a déshonorée, après 10 ans de silence et d'absence.

À la suite de la disparition subite de sa femme, Tony convoque les membres de sa famille pour la retrouver. Surgira du passé Ivana (François-Xavier Dufour), une femme marginale que Tony (Roger La Rue) ne reconnaît pas immédiatement, mais qui s'avère être son fils honni. 

Toute la vérité

Débute un drame comique typiquement italien, alors que tous refusent de reconnaître une réalité inacceptable à leurs yeux. Cette galerie de personnages colorés devra faire face à ses mensonges et ses contradictions pour que la vérité (toute la vérité) éclate au grand jour. La Petite Italie va se réveiller avec un méchant mal de bloc.

« Depuis les sorties de Caitlyn Jenner et de Laverne Cox, les transgenres sont devenus ce que les gais étaient dans les années 90, explique Galluccio. Ils sont encore marginalisés, pas tout à fait acceptés. Toutefois, on sent que les mentalités commencent à changer. Tu as le droit de t'affirmer comme tu es. Si les gens t'acceptent, tant mieux ; sinon, tant pis. »

« J'ai vu un reportage d'Oprah Winfrey sur les partisans de Trump à 60 Minutes. Un républicain du Midwest disait accepter les homosexuels parce qu'ils sont nés ainsi, alors que les transsexuels choisissent de changer de sexe... Comme c'est ironique ! Il y a 20 ans, cet homme aurait dit exactement la même chose à propos des gais. »

Galluccio ne fait pas qu'éventer les secrets de la Petite Italie de Montréal ; il a réservé le même sort à celle de Toronto. Il a en effet coscénarisé la comédie romantique Little Italy, réalisée par Donald Petrie, et mettant en vedette Hayden Christensen, Emma Roberts, Alyssa Milano et Danny Aiello. Le film a été tourné l'hiver dernier à Toronto avec un budget de 30 millions et sortira sur les écrans en 2018.

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Les secrets de la Petite Italie, chez Duceppe du 25 octobre au 2 décembre