L'amour est à réinventer, disait Arthur Rimbaud. Anne-Marie Olivier a pris le poète aux mots. Dans Faire l'amour, sa pièce de théâtre documentaire présentée à Espace Libre, l'auteure de Québec explore, tel un géographe du désir, plusieurs facettes de la sexualité. Hygiénique ou romantique, le spectre sexuel y est assez large, quoique pas si diversifié.

Si la prémisse d'Anne-Marie Olivier (qui joue également dans la production) était de créer une pièce à partir «d'histoires de cul», l'Amour a bien fini par fourrer son nez dans ces ébats entre adultes consentants.

Que voulez-vous, le sexe est un sujet aussi évident que paradoxal. Dans la cartographie de nos amours réelles, il y a beaucoup de place à l'imaginaire...

Trop de place? Le spectacle ne donne pas de réponses. Il nous montre plutôt les contrées inexplorées, les territoires flous, les passions allumées par l'alchimie de deux corps enlacés (ou plus!). La beauté de l'amour, par-delà la rencontre entre deux solitudes, c'est qu'il arrive à nous rendre plus grands, plus forts, plus vivants.

C'est connu, l'amour arrive à nous faire accepter l'inexplicable, souhaiter l'imprévisible, relever l'insurmontable, jusqu'au jour où nos corps se disent adieu. Mais ça, c'est aussi dans la pièce...

Un homme et une femme

Faire l'amour est construit à partir des réponses d'une centaine de personnes à un questionnaire sexuel et amoureux. Parmi cet amas d'histoires vécues, les concepteurs en ont retenu (et édité) une vingtaine. Le texte très imagé de Mme Oliver est mis en scène sobrement, efficacement, par Véronique Côté. Ce spectacle très beau et poétique (magnifique décor de Claudie Gagnon) est à mille lieues de la pornographie omniprésente de notre époque. On évoque la sexualité avec douceur et sensualité, sans jamais tomber dans la facilité ou la vulgarité. Et ça fait du bien!

Toutefois, bien qu'en entrevue Mmes Olivier et Côté se disaient «soucieuses de représenter la diversité sexuelle» dans leur vaste collecte d'expériences sexuelles, les récits parlent exclusivement de relations hétérosexuelles. Sauf une (très) brève scène racontant le «coming out» de la régisseuse lesbienne à ses parents... Comme si la sexualité (et l'amour) chez les gais et les lesbiennes ne se limitaient qu'à sortir du placard!

Malgré ce bémol, cette pièce rafraîchissante vaut le détour. D'autant plus qu'elle est défendue par quatre excellents interprètes (Maryse Lapierre, Eliot Laprise, Nicola-Frank Vachon et Mme Olivier). Ils sont accompagnés par un musicien sur scène, Mathieu Campagna.

Finalement, soulignons que Faire l'amour est publiée chez Atelier 10 dans la collection Pièces.

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À l'Espace Libre jusqu'au 29 novembre.