Sarah Berthiaume, Nicolas Cantin, Alexandre Fecteau, Dana Michel, Alain Farah, Julie Favreau, Denis Côté, Stéphane Lafleur, c'est toute une délégation de créateurs québécois qui revient du Festival ActOral à Marseille. À partir de demain, l'Usine C proposera un condensé de la programmation franco-québécoise concoctée par Hubert Colas, qui s'intéresse aux écritures contemporaines.

Hubert Colas n'était jamais venu au Québec avant 2012. Le dramaturge et metteur en scène français y a d'abord présenté sa pièce Kolik, qui a reçu un accueil plus que favorable. En début d'année, il a présenté Face au mur (de l'auteur anglais Martin Crimp) avec un égal succès.

Depuis, le dramaturge se plaît à présenter son travail au public québécois et loue le travail de nos auteurs.

C'est au cours de ces deux dernières années que le fondateur du Festival ActOral, consacré aux écritures contemporaines (en cinéma, danse, théâtre, arts visuels et littérature), a eu envie d'intégrer un volet québécois à son festival afin de «favoriser des complicités entre artistes». Un programme repris en partie à l'Usine C.

«C'est un festival d'écriture, qui a pour spécificité d'interroger l'écriture dans tous les domaines artistiques, précise Hubert Colas, au cours d'un entretien téléphonique de Marseille. Cela nous a amenés à trouver des écritures singulières chorégraphiques ou plastiques, dont la mixité crée de nouvelles formes d'écriture.»

Comment le public français a-t-il réagi aux propositions des artistes québécois? «Dans un premier temps, ç'a été accueilli avec enthousiasme et par moments avec curiosité, répond Hubert Colas. Après, il y a eu un étonnement à l'égard de la création québécoise, particulièrement autour de Dana Michel ou Nicolas Cantin.»

Quel regard Hubert Colas porte-t-il sur les écritures contemporaines québécoises?

«Je pense qu'il y a des préoccupations dans les rapports humains qui sont différentes des nôtres. Il y a aussi la notion de grandeur et de continent que l'on retrouve chez Sarah Berthiaume, par exemple, qui est différente. Mais en matière de forme, je pense que les artistes contemporains ont des préoccupations qui se recoupent.»

Nécessaire et urgent

En plus de diriger ActOral, Hubert Colas signe la mise en scène de la pièce Nécessaire et urgent, d'Annie Zadek. Un texte qui se décline en 500 questions qu'elle aurait aimé poser à ses parents. Plus spécifiquement sur leur exil de Pologne en 1937, avant le début de la Deuxième Guerre mondiale.

«C'est un spectacle particulier puisque les deux interprètes ne portent pas de dramaturgie précise, mais ils évoquent le passé de leur famille à travers des questions qui restent sans réponse», dit-il.

Selon lui, l'auteure aborde plus largement notre rapport au monde. «Pourquoi on s'installe dans un pays? Pourquoi on part? Pourquoi on reste avec quelqu'un? Pourquoi on tombe amoureux? Pourquoi on met fin à une relation? Et comment nous vivons avec cette mémoire fantôme, qui est toujours présente?»

Les lignes de force se trouvent dans la correspondance entre le public et les deux acteurs, qui posent des questions, nous dit le metteur en scène. «La mise en scène donne aux questions l'espace-temps de sa mémoire, au masculin comme au féminin. Une sorte de cérémonie théâtrale qui nous amène à nous questionner sur les corps réels et les corps fantômes.»

ActOral Montréal pourrait être réédité sur une base biennale, selon Hubert Colas. Tout dépendra de l'accueil des Montréalais... N'empêche, le dramaturge parle d'ores et déjà de la mise sur pied de «résidences d'artistes» à Montréal, Marseille et Bruxelles, qui vont dans le sens de ces «complicités artistiques». «J'espère que nous saurons donner une suite à cette aventure.»