Les intermittents menacent de faire capoter les festivals d'été, à commencer par Avignon, pour peser sur les négociations autour de leur régime d'assurance-chômage, et, en coulisses, la CGT a décidé de demander à la justice d'annuler la convention dans son ensemble.

Emblème des festivals de l'été, le personnel du «in» d'Avignon a mis son poids dans la balance en «exigeant» que le ministre du Travail, François Rebsamen, n'agrée par l'accord sur les nouvelles règles d'indemnisation des chômeurs signé par le patronat et trois syndicats (CFDT, FO et CFTC).

«Si l'État devait agréer l'accord du 22 mars, nous nous réservons la possibilité d'appliquer notre droit de grève dès le 4 juillet (date de l'ouverture du festival, ndlr) et le gouvernement en assumera les conséquences», mettent en garde artistes, régisseurs et techniciens.

Du côté des directions de festivals et des entrepreneurs de spectacles, les appels se multiplient en direction du gouvernement en soutien aux revendications des intermittents.

Vingt festivals de musiques actuelles (Eurockéennes, Vieilles Charrues, Garorock, Marsatac...), qui emploient 5000 intermittents, demandent la suspension de la réforme, tout comme le SPI (producteurs audiovisuels), tandis que le Prodiss (producteurs privés de spectacle de musiques actuelles) réclame un «moratoire» jusqu'au 1er septembre.

«Nous ne voulons et nous ne pouvons revivre 2003», écrit de son côté le Syndicat professionnel des producteurs, festivals, ensembles et diffuseurs indépendants de musique (Profedim) dans une lettre ouverte au gouvernement.

«Les financeurs publics seront-ils en mesure, comme en 2003, de compenser tout ou partie des annulations qui sont en train de se multiplier?», s'interroge-t-il, dans cette lettre signée notamment par le fondateur des Arts Florissants William Christie et la direction du Festival d'Aix-en-Provence.

En 2003, la précédente réforme d'ampleur du régime des intermittents avait provoqué un mouvement de colère et des annulations de festivals, comme Avignon, Aix ou Les FrancoFolies.

Sur le terrain, une trentaine de structures (compagnies, festivals, tournages...) se sont mises en grève ou ont été perturbées depuis une semaine, selon un pointage effectué par la CGT-Spectacle.

Parmi les manifestations touchées, figuraient notamment Le Printemps de Comédiens (Montpellier), Rio Loco (Toulouse) ou le festival «Furies» (Châlons-en-Champagne).

La CGT-Spectacle a annoncé une nouvelle journée d'action le lundi 16 juin, avec un rassemblement à partir de 14h30 place du Palais-Royal à Paris, à deux pas du ministère de la Culture, et appelle à amplifier les débrayages ce jour-là.

«Notre but n'est pas de bloquer les festivals, au contraire. On a posé un préavis de grève pour le mois de juin avant la fin de la procédure d'agrément. Pour le moment, on n'a pas déposé de préavis pour le mois de juillet pour une raison simple, c'est qu'on espère bien être entendu», a souligné le secrétaire général de la CGT-Spectacle Denis Gravouil, lors d'une conférence de presse.

La CGT-Spectacle, qui doit rencontrer jeudi le médiateur nommé par le gouvernement sur le dossier, craint que cette médiation n'aboutisse qu'à «des mesurettes d'ordre social pour essayer d'améliorer les choses pour les intermittents les plus précaires, tout en restant dans le cadre d'une convention qui aggrave la réforme de 2003».

«On dira au médiateur (le député Jean-Patrick Gille) qu'il n'y a pas de solution si la convention est agréée», a martelé M. Gravouil.

La convention chômage contestée doit être examinée le 18 juin par le Conseil national de l'emploi, avant une signature projetée fin juin par le ministre du Travail.

M. Gille doit remettre ses propositions au gouvernement sous 15 jours et une concertation tripartite entre l'État et les partenaires sociaux sera organisée au début de l'été.

Parallèlement, la bataille s'engage aussi devant les tribunaux.

La CGT a annoncé mercredi qu'elle assignait en justice les signataires de la convention d'assurance-chômage afin de demander l'annulation du texte qui concerne l'ensemble des salariés en raison de la «déloyauté» des négociations.