La saison-anniversaire du Théâtre Jean-Duceppe allait pourtant bon train. Avec la Vénus au vison à l'automne et L'esprit de famille, présentée en début d'année, Duceppe a frappé deux bons coups.

Malheureusement, la pièce Sunderland met fin à cette courte série victorieuse.

La pièce du Français Clément Kock, mise en scène par Serge Postigo, est généralement ennuyeuse. Le texte est moralisant, la distribution inégale, le jeu caricatural, l'intrigue prévisible.

L'action se passe dans la petite ville côtière de Sunderland, en Angleterre. Dans ce cadre typiquement english, Postigo a décidé que ses personnages issus de la classe ouvrière nous parleraient dans un joual appuyé.

Tous sauf un: une Française nommée Ruby, qui gagne sa vie en faisant des appels érotiques.

On a beau nous expliquer que cette Ruby, interprétée par Karine Belly (qui vit chez Sally), est française, rien n'y fait. Son accent pointu et ses expressions françaises ne collent pas à l'univers de ces «Anglais» de la marge.

Sally Mawln est une jeune femme seule, qui s'occupe, tant bien que mal, de sa soeur handicapée Jill, qui souffre d'«une forme d'autisme». Mais voilà, Sally en arrache depuis que l'usine où elle travaillait a fermé ses portes.

Toute l'intrigue repose sur le fait que si Sally ne trouve pas un emploi, elle perdra la garde de sa soeur, qui sera placée dans un centre d'accueil.

Le jeu de Catherine-Anne Toupin dans le rôle de Sally est caricatural. Non seulement la comédienne se répand dans ses sentiments pour sa soeur et son amie Ruby, mais elle joue l'étonnement les yeux exorbités, la colère avec le poing en l'air.

Le jeu physique de Marie-Ève Milot, dans le rôle de Jill, sauve la mise. On finit par s'attacher à cette ado handicapée, qui prend plaisir à aller voir des matchs de foot avec Gaven, un ami de la famille (Frédéric Blanchette est lui aussi très bon).

Une courte scène contribue également à sauver Sunderland de la catastrophe. Un couple gai, à la recherche d'une mère porteuse, débarque chez Sally, pour y laisser des échantillons de ses semences.

Henri Pardo et Eloi ArchamBaudoin nous offrent ici un de ces beaux moments de théâtre. On les remercie.

Chez Duceppe jusqu'au 29 mars.