On compare parfois la création théâtrale à un gros carré de sable pour grands enfants. Un terrain de jeu à l'intérieur duquel des acteurs et des actrices laissent aller leur imaginaire et leur folie, sans limites ni censure.

C'est exactement ce que font, avec brio, les trois créateurs du Projet bocal, Sonia Cordeau, Simon Lacroix et Raphaëlle Lalande (tous diplômés du Conservatoire d'art dramatique de Montréal).

Il s'agit assurément de l'objet théâtral le plus ludique et farfelu à l'affiche en ville! Et si vous n'avez pas perdu votre coeur d'enfant, vous risquez de bien vous amuser à La Petite Licorne devant cette série de saynètes et de pièces musicales sans véritable sens, mais tellement divertissantes!

Le jeune trio touche à tout avec sa première production: il signe à la fois le texte, la mise en scène, en plus de jouer et de chanter. Entre des reprises de tubes des années 50 et 60 (You Can't Hurry Love des Supremes, You Belong to Me de Johnny Mathis), des chansons originales qui sonnent comme un croisement entre Lynda Lemay et Lisa LeBlanc (oui, je sais, c'est aussi étrange que cette proposition théâtrale!), Le projet bocal installe durant près de 90 minutes un climat étrange et délirant.

C'est «comme un cabinet de curiosités», expliquait Simon Lacroix, en entrevue à La Presse. On est parfois dans la nostalgie (les actrices sont habillées de robes rétro), parfois dans le suspense, souvent dans la fantaisie, mais jamais dans le réalisme. Il est question du vide, du couple, de la famille. Il y a une femme atteinte de la maladie de la «clémentite», qui évacue des clémentines «par tous ses orifices»!! On voit un amant se prolonger dans sa maîtresse... un peu comme le fleuve dans la mer.

Puisqu'il est question de ludisme, parlons du jeu des interprètes. Tous les trois sont excellents, changeant de registre ou de situation sans faux pas. Simon Lacroix a un peu l'énergie pince-sans-rire d'un Éric Bernier, par exemple. L'acteur signe également la riche conception sonore du spectacle, aussi présente qu'un personnage. Il est habilement secondé par Jérémie Boucher aux éclairages et Elen Ewing à la scénographie (formée de plusieurs bocaux suspendus qui s'illuminent comme des lanternes).

C'est à l'affiche à peine dix jours... alors vous savez quoi faire!

__________________________________________________________________________

À La Petite Licorne, jusqu'au 22 mars.