Duceppe a l'habitude de programmer du théâtre «qui fait du bien» à ce moment-ci de la saison, pour mettre la table aux réjouissances des Fêtes et sans doute aussi aider à affronter le coeur de l'hiver. Sa pièce légère de cette année s'intitule Un village de fous, une oeuvre du célèbre dramaturge et scénariste américain Neil Simon qui, contrairement à ses comédies à succès, ne se déroule pas à New York ni même en Amérique.

Un village de fous se déroule en fait dans un passé indéfini dans un petit bled d'Ukraine où tout le monde est  plutôt zinzin - voire franchement bête. On y vend des fleurs comme si c'était du poisson, on y mêle le haut et le bas et on y tremble de tous ses os chaque fois que quelqu'un prononce le nom du comte Yousekevitch, descendant du vilain qui a jeté un sort sur les habitants de Kulyenchikov.

Conte, fable, comédie romantique, théâtre absurde, la pièce de Neil Simon est un étrange patchwork. Elle débute avec l'arrivée du nouvel enseignant (Antoine Durand) déterminé à apporter sur ce trou perdu les lumières de la connaissance. Il se rend vite compte que sa tâche sera herculéenne. Il aurait d'ailleurs pris ses jambes à son cou si son coeur ne s'était pas épris de la plus belle «cruche» du village: Sophia Zubritzky (Émilie Bibeau).

Monique Duceppe, qui signe la mise en scène, souligne de manière appuyée le côté conte de fées en optant pour des costumes aux couleurs pétantes et un décor spectaculairement artificiel. Le jeu est à l'avenant: appuyé, avec adresse dans le cas d'Émilie Bibeau, et avec moins de justesse dans le cas de Laurent Duceppe (Snetsky, un berger aussi égaré que ses moutons). Le ton du spectacle est mouvant lui aussi et oscille entre la comédie de théâtre d'été, l'absurde à la Claude Meunier et le comique épique ampoulé.

Un village de fous n'est jamais cité parmi les meilleures pièces de Neil Simon et pour cause: son arc dramatique est aussi faible et prévisible que sa morale. Sa seule audace est de briser le quatrième mur en sollicitant la participation des spectateurs dans une scène ou deux. La bêtise des uns et l'arrogance couarde de l'autre - celle du comte Yousekevitch, interprété par l'amusant Luc Bourgeois - arrachent néanmoins des sourires et même quelques éclats de rire. On en gardera surtout le souvenir d'un spectacle convenu, à la folie plus doucereuse qu'engageante.

Jusqu'au 9 février, avec une pause pour le congé des Fêtes.