Vive, curieuse, rayonnante, Émilie Bibeau brille autant en entrevue que sur les planches ou devant la caméra. Rencontre avec une actrice qui a le vent en poupe.

Après avoir joué à La Licorne dans Ce moment-là, un drame familial troublant, et participé au succès télévisuel de l'automne Unité 9, Émilie Bibeau est ces jours-ci sur la scène du Théâtre Jean-Duceppe dans Un village de fous de Neil Simon, sous la direction de Monique Duceppe.

Les habitants du village en question sont sous l'emprise d'un sortilège jeté il y a 200 ans et qui les a tous rendus fous! La pièce commence avec l'arrivée au village d'un nouvel instituteur zélé et carriériste (Antoine Durand). En quelques heures, l'enseignant réalise qu'il vit aux côtés d'une bande de fêlés et de tordus. Mais le jeune homme décide de rester et de défier la folie quand il fait la rencontre de la belle Sophie.

«Je joue Sophie, un rôle de jeune première et d'amoureuse, explique Émilie Bibeau. La pièce est une fable comique et réjouissante sur l'humanité. C'est une comédie qui fait du bien à l'âme. Un véritable conte de fées où la réalité finit toujours par triompher du mauvais sort.»

Fille unique et choyée par ses parents, Émilie Bibeau a grandi à Québec avant de déménager à Montréal, à 19 ans. Elle n'a pas eu à se battre contre le mauvais sort depuis sa sortie du Conservatoire d'art dramatique - la comédienne s'est rapidement installée dans le paysage théâtral et télévisuel.

Émilie Bibeau passe de la création aux téléromans populaires et navigue avec aisance entre les rôles comiques et les personnages complexes. «J'admire les acteurs polyvalents, dit-elle. Des acteurs aussi bons dans la tragédie que dans la comédie. Les interprètes qui sont capables de tout faire, comme Anne Dorval et Guylaine Tremblay, m'inspirent beaucoup.»

L'impact de Rosalie

Il faut dire que la comédienne a eu le cadeau d'un rôle marquant en début de carrière: la jeune déficiente intellectuelle dans Annie et ses hommes, de 2005 à 2009. Le genre de rôle qui peut lancer ou casser une carrière. «Rosalie est un cadeau dans mon parcours. Parce que c'est rare, des rôles de composition à la caméra aussi forts. Pour moi, Annie et ses hommes est précieux, professionnellement et humainement.»

Humain. Ce mot revient souvent dans la bouche d'Émilie Bibeau. «Mon métier est un métier d'humanité, estime-t-elle. Un acteur se nourrit au contact des autres êtres humains, des choses de la vie. Il faut être aussi un acteur dans la Cité, demeurer actif et curieux de ce qui se passe autour de soi, de ce que les autres font tant en art que dans la société.»

La comédienne Anne-Marie Cadieux lui a déjà confié qu'elle aborde ce travail avec trois règles d'or: «Ouverture, générosité et humour face à soi-même.» Des règles qu'Émélie Bibeau pourra sûrement appliquer cet hiver. Après Duceppe, elle sera au Théâtre d'Aujourd'hui, à la mi-février, dans la prochaine création de l'auteur et metteur en scène Olivier Keimed, Furieux et désespérés, notamment avec Maxim Gaudette.

«Olivier a fait un voyage en Égypte sur la trace de ses origines, en 2008. Il a rencontré des Égyptiens qui, contrairement à sa famille, ont décidé de rester là-bas. C'est un sujet qui me touche, parce ma mère est Italienne et elle a aussi émigré au Québec. On a souvent des discussions sur le rapport à l'exil, aux racines et à l'identité, le sentiment de n'appartenir à nulle part.»

Unité 9

Ensuite, le printemps prochain, elle commencera le tournage de la deuxième saison d'Unité 9. Pour son plus grand bonheur. La comédienne trouve incroyables les réactions nombreuses et positives des gens qu'elle croise dans la rue. Un succès qu'elle explique ainsi: «À la base, Unité 9, c'est un très bon sujet, original et bien fouillé par l'auteure, Danielle Trottier, qui y travaille depuis six ans. Puis, il y a une productrice [Fabienne Larouche] qui a cru au projet et l'a défendu jusqu'au bout. Ensuite est arrivé un réalisateur, Jean-Philippe Duval, très attaché au téléroman, et qui prend ça vraiment à coeur.»

Sans oublier l'excellente distribution, qui vient porter cet univers dur et ses personnages marginaux dans le salon des Québécois. «Le public se met à aimer des personnages qui ont des choses à se reprocher, qui sont loin d'être parfaits, remarque Émilie Bibeau. C'est à la fois troublant et confrontant pour les téléspectateurs.

«Dans la vie, je ne crois pas que les gens pensent qu'ils puissent un jour s'attacher à des criminels...»

Un village de fous. Au Théâtre Jean-Duceppe, jusqu'au 9 février.

Furieux et désespérés. Au Théâtre d'Aujourd'hui, du 19 février au 16 mars.